Étienne Bonnot de Condillac:Le Commerce et le gouvernement considérés relativement l’un à l’autre - Objet de cette seconde partie

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Étienne Bonnot de Condillac:Le Commerce et le gouvernement considérés relativement l’un à l’autre - Objet de cette seconde partie


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OBJET DE CETTE SECONDE PARTIE

Presqu’entièrement semblables les uns aux autres par les besoins qui sont une suite de notre conformation, nous différons surtout par les besoins qui sont une suite de nos habitudes, et qui, se multipliant à proportion du progrès des arts, développent par degrés notre sensibilité et notre intelligence. Bornés aux besoins que j’ai nommés naturels, les peuples sont comme abrutis. Il semble que rien n’appelle leurs regards : à peine sont-ils capables de faire quelques observations. Mais leur vue se porte sur de nouveaux objets, à mesure qu’ils se font de nouveaux besoins. Ils remarquent ce qu’ils ne remarquaient pas auparavant. On dirait que les choses ne commencent à exister pour eux, qu’au moment où ils ont un intérêt à savoir qu’elles existent.

Quelqu’avantageux que soit ce progrès, il serait dangereux pour un peuple de se piquer de trop de sensibilité, et de n’avoir une surabondance d’esprit que pour l’appliquer à des choses frivoles. Voilà cependant ce qui arrive partout où les besoins se multiplient à l’excès. Alors, jouet plus que jamais des circonstances qui changent continuellement, un peuple change continuellement lui-même, et s’applaudit de tous ses changements. Ses usages se combattent, se détruisent, se reproduisent, se transforment : toujours différent de lui-même, il ne sait jamais ce qu’il est. Il se conduit au hasard d’après ses habitudes, ses opinions, ses préjugés. Il ne songe point à se réformer : il ne pense pas en avoir besoin. Préoccupé de ce qu’il croit être, les lois ou les abus, l’ordre ou le désordre, tout semble lui être égal ; et son illusion est telle, qu’il s’imagine voir sa prospérité dans les choses mêmes qui prouvent sa décadence.

Est-ce en combattant directement les usages d’un pareil peuple, qu’on pourrait se flatter de l’éclairer ? Il est trop aveuglé, et ses yeux se refuseraient à la lumiere, dès qu’elle lui montrerait des vérités qu’il ne veut pas voir.

Afin donc qu’il jugeât de ses erreurs, il faudrait qu’il ignorât que ce sont les siennes. Or on pourrait, par des suppositions, essayer de les lui montrer dans d’autres peuples, où il aurait quelque peine à se reconnaître. On pourrait au moins lui faire voir sensiblement les avantages dont il se prive, si on lui faisait remarquer ceux dont jouirait un peuple qui n’aurait pas ses préjugés. C’est ce que je me propose dans cette seconde partie. Cette méthode est d’ailleurs l’unique moyen de simplifier les questions trop compliquées qui se font sur le commerce, considéré par rapport au gouvernement ; et il faut les simplifier, si on veut les traiter avec précision.




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