Différences entre les versions de « Les systèmes socialistes et l'évolution économique - Première partie : Les théories. Les systèmes de société socialiste - Livre II : Des formes socialistes qui conservent la valeur régie par l’offre et la demande »

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la réglementation de l'État, comme le fait M. Jaurès dans son collecvisme
la réglementation de l'État, comme le fait M. Jaurès dans son collecvisme
corporatif.
corporatif.
=== Section II. Corporations ouvertes; Systèmes de MM. Hertzka et Oppenheimer. ===
Lassalle est peut-être le premier qui ait songé aux associations
librement ouvertes. Son but est la suppression des primes capitalistes
pour que le produit se distribue dans la mesure des prestations
fournies par chaque participant, il faut que le travail commun
de la société s'exerce sur les avances communes de la société. Le
moyen transitoire le plus doux pour améliorer la situation des travailleurs
consisterait à créer, avec le crédit de l'Etat, des associations
productrices de travailleurs, qui s'étendraient progressivement
à l'ensemble de la classe ouvrière. Dans une même localité,
chaque corps de métier formerait une association unique, de sorte
qu'il n'y aurait pas concurrence entre les producteurs d'une même
ville. Lassalle esquisse en même temps le projet d'une organisation
centralisée : les diverses associations régionales d'un même métier
pourraient se grouper en union centrale d'assurance, de manière à
égaliser les risques, et à décider au besoin la translation de la production
d'un lieu à un autre. Toutes les associations créées avec
l'aide de l'État formeraient une union de crédit unique, et se communiqueraient
réciproquement leurs renseignements statistiques
sur les besoins de la production par l'organe de leurs commissions
centrales. L'État n'aurait pas la dictature; il se réserverait seulement
un droit de contrôle, pour veiller à l'observation des statuts et à
l'emploi de ses avances. Dans l'association, le profit de l'entreprise
serait distribué annuellement entre les travailleurs en sus de leurs
salaires réguliers; mais chaque groupe professionnel resterait naturellement
ouvert à tous les travailleurs du métier qui voudraient en
faire partie. Lassalle se borne d'ailleurs à cette indication, sans en
signaler les conséquences au point de vue de l'égalisation des profits
M. Dühring, dans les premières éditions de son Cours d'économie nationale, avait présenté un système de socialisme communal basé
sur ce même principe de libre circulation, que M. Menger a également
repris depuis lors. Dans ce système, la société se compose d'une fédération
de communes celles-ci sont propriétaires de leur territoire et
des établissements de production qui y sont situés, mais elles doivent
admettre les nouveaux venus suivant des règles générales
déterminées, et respecter la libre circulation des personnes. Les
communes font entre elles des échanges; à l'intérieur de la commune,
la valeur des travaux et des produits s'établit d'après le temps de
travail moyen dépensé; néanmoins, la valeur s'exprime en monnaie
métallique, qui subsiste comme moyen de circulation.
Deux auteurs allemands, MM. Hertzka et Oppenheimer, s'inspirant
de ces combinaisons, ont tracé nouvellement des plans de société
analogues. Tous deux exposent un état social dans lequel des
associations de production, formant un réseau complet sur l'ensemble
du pays, exploitent à leur profit la terre et les instruments de travail
dont elles sont propriétaires, ou dont elles ont au moins la jouissance
dans des conditions équivalentes à la propriété. Ces associations,
entièrement libres dans la direction de la production, vendent
leurs marchandises à des prix de concurrence. Elles répartissent le
produit net de l'entreprise entre leurs membres au prorata du travail
fourni, sauf à établir des primes ou des taux de répartition variables
suivant les conditions de la concurrence.
Jusqu'ici, rien d'original. Mais un principe nouveau doit transformer
l'association en instrument de rénovation sociale; c'est le
principe du libre accès des entreprises à toute personne qui se présente
pour y travailler et participer aux bénéfices. Grâce à la libre
circulation qui s'établit entre les emplois, un même niveau de profits
se maintient pour tous. Dans les établissements industriels qui réalisent
les plus forts bénéfices, dans les établissements agricoles qui
jouissent de la rente du sol la plus élevée, les travailleurs affluent,
jusqu'à ce que les parts individuelles s'abaissent au même niveau
qu'ailleurs. Nul ne peut donc se plaindre de l'inégale répartition des
terres et des capitaux, même lorsqu'ils sont concédés sans charge de fermage ou d'intérêt; car une industrie privilégiée, faisant
hausser les parts individuelles des travailleurs dans les autres
industries par l'attraction qu'elle opère, communique à toutes les
avantages dont elle jouit.
Les sociétés décrites par les deux auteurs se distinguent cependant
par quelques différences notables.
Dans l'organisation sociale définie par M. Oppenheimer, les associations
achètent les produits à leurs membres, et les revendent soit
à d'autres associés, soit au dehors ces échanges se font en monnaie
courante. Dans le Freiland de M. Hertzka, tous les produits sont
livrés aux magasins publics. Là, les prix payés aux producteurs sont
bien mesurés en monnaie métallique et fixés d'après l'offre et la
demande mais la monnaie, si elle sert de mesure de la valeur, ne
fonctionne jamais comme moyen de paiement; toutes les recettes et
les dépenses des associations et des individus, si minimes soient elles,
se règlent par de simples jeux d'écriture, par des inscriptions
à leur débit et à leur crédit sur les livres d'une banque nationale.
M. Hertzka veut sans doute que l'État puisse contrôler l'emploi des
capitaux qu'il a prêtés, s'opposer à l'usure, et surtout faire connaître
au public les bénéfices réalisés dans les exploitations particulières,
pour que l'équilibre s'établisse par le déplacement des travailleurs
exactement informés. Mais proscrire l'usage de l'argent, c'est proscrire
du même coup la seule base tangible de la valeur en régime de
concurrence.
Tandis que M. Hertzka suppose des associations de production qui
exploitent chacune une branche d'industrie particulière, M. Oppenheimer
conçoit la ''Siedlungsgenossenschaft'' comme un organisme
complet qui se suffit à peu près à lui-même. C'est, sur le modèle de
l'ancienne Marke germanique, une communauté économique et
même politique, qui a pour base réelle une certaine portion de territoire.
Le socialisme y est donc plutôt communal que corporatif;
je le classe ici néanmoins, parce que la contrainte n'y apparaît
pas. Cette communauté réalise l'union de l'agriculture et de l'industrie,
car elle comprend à la fois une association agricole pratiquant
la culture collective sur la terre commune, et des entreprises industrielles,
coopératives et individuelles, créées et créditées par l'association
mère dans la mesure de ses besoins. Elle est aussi une société
coopérative de consommation, achetant les produits de ses membres
et les revendant au prix coûtant. Par cette combinaison de formes,
la communauté assure un débouché dans son sein aux produits de
ses organes de production; pratiquant l'économie naturelle, elle est
à l'abri de la conjoncture, et ne dépend du marché extérieur que pour
les marchandises qu'elle ne peut produire elle-même, marchandises
intéressant son confort sans doute, mais non son existence. D'autre
part, la communauté, comme la société coopérative de consommation,
a tout avantage à étendre le cercle de ses membres; les nouveaux
producteurs sont en même temps des consommateurs pour la valeur
intégrale de leurs produits, et viennent accroître la puissance et le
crédit de l'association.
M. Oppenheimer se fait peut-être quelque illusion sur l'indépendance
économique de ses communautés. Nous ne sommes plus au temps
archaïque de l'économie naturelle, et nul groupe, si étendu soit-il,
ne saurait, dans un état de haute civilisation, se dérober à la nécessité
de l'échange avec l'extérieur pour le soutien même de son existence.
La communauté de production et de consommation, quelle
que puisse être sa puissance productrice, devra se procurer au dehors
la houille, les métaux, les machines, les denrées coloniales, les
matières exotiques nécessaires à ses industries; si elle entreprend la
grande industrie, comme il est nécessaire pour agir sur le capitalisme,
elle devra se conformer aux conditions modernes de la division du
travail, et produire pour le marché national ou même universel; de
toute manière, elle sera obligée, pour payer ses importations, de
vendre des produits agricoles ou industriels à d'autres qu'à ses
membres, et ne pourra par conséquent échapper aux risques de la
concurrence avec le monde extérieur.
M. Hertzka, dans Freiland, trace son plan de société pour des
colons qui s'établissent dans une contrée vierge, où des institutions
capitalistes préexistantes ne gênent pas le développement de l'ordre
nouveau; l'État, seul propriétaire nominal des terres, seul propriétaire
aussi des instruments de production, qu'il se procure au moyen
de l'impôt prélevé sur les revenus du travail, concède les terres et
avance les capitaux aux associations de travailleurs sans charge de
redevance. Cette peinture d'un état nouveau, présentée sous les
couleurs les plus séduisantes, eut un si vif succès, qu'après quelques
années de propagande, une souscription permit en 1894 de diriger
une petite expédition vers l'Afrique orientale allemande pour tenter
d'y fonder Freiland. Elle échoua, dit l'auteur dans la préface de sa
dixième édition, à cause de certaines difficultés rencontrées en route,
et du défaut de discipline et de concorde chez les membres de l'expédition.
Tout autre est la conception de M. Oppenheimer. S'il décrit des
organismes nouveaux, ce n'est pas pour les plateaux de l'Afrique ou
pour l'ile d'Utopie; c'est pour les pays d'ancienne civilisation, où ils
peuvent naître et se développer à la faveur d'une législation libérale
sur les associations. Les communautés territoriales, grâce au gage
réel qu'elles pourraient offrir, à la solidarité de leurs membres, à la
puissance de leur organisation coopérative, jouiraient d'un crédit
très étendu, qui leur permettrait d'acheter la terre et les instruments
d'exploitation. Dans la concurrence, la victoire leur serait assurée
par la supériorité de leur production à grande échelle, le bon marché
de leurs emprunts, la sûreté de leur clientèle, l'économie qu'elles
réaliseraient en épargnant les frais d'intermédiaires et de transport.
Elles s'empareraient donc progressivement de la production, et attireraient
les travailleurs par tous les avantages matériels et moraux
qu'elles leur offriraient. Lorsqu'elles seraient parvenues à se délivrer
par l'amortissement du poids de l'intérêt capitaliste, elles posséderaient
des terres qu'elles concéderaient sans fermage, des capitaux
qu'elles prêteraient sans intérêt à leurs organes de production. Elles
permettraient ainsi à leurs membres de bénéficier du produit intégral
de leur travail, et obligeraient par leur concurrence les entreprises
privées dont elles ne se seraient pas encore emparées à élever le
salaire jusqu'au point où il absorberait le revenu capitaliste. Alors le
capitalisme aurait vécu, et la transformation sociale serait complète.
A la différence de M. Hertzka, M. Oppenheimer place donc ses
associations en plein milieu capitaliste, et sa foi dans leur puissance
d'expansion est telle, qu'il les croit capables de tuer l'intérêt, la rente
et le profit en pratiquant chez elles le crédit gratuit, la concession
gratuite.
Sans discuter pour le moment ces prévisions optimistes, je suppose
les associations parvenues à leur plein développement, soit dans un
ancien État capitaliste, soit dans Freiland; la société sera-t-elle transformée
? Oui sans doute, à une condition essentielle, que négligeaient
les premiers théoriciens du socialisme sociétaire et que les
deux écrivains modernes mettent au contraire nettement en relief
il faut que les associations, au lieu de rester de petits groupes fermés,
comme l'ont été jusqu'ici les sociétés coopératives de production,
soient ouvertes à tous, et admettent en participation tous ceux qui
se présentent. Or, pour des entreprises de production, le libre accès,
c'est le sacrifice du profit et de la rente du sol, de tout revenu qui
dépasse le salaire courant du travail; sacrifice particulièrement onéreux
dans la période de début de l'ordre sociétaire, quand les coopératives
de production ne sont encore que des îlots dans le monde
capitaliste, incapables de déterminer par leurs seules forces une
hausse des salaires, mais condamnées, au contraire, à réduire les
bénéfices de leurs membres au taux du salaire capitaliste, si elles
doivent admettre en participation tous ceux qui leur demandent du
travail.
Les nouveaux producteurs, dit-on, donnent au travail collectif un
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lorsque l'importance de leur capital et l'étendue de leurs débouchés
leur permettent d'agrandir l'entreprise, il est avantageux en même
temps pour les sociétaires de rester seuls participants, et de n'admettre
les nouveaux venus qu'à titre de salariés. Le groupe primitif
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heure. Or, il n'y a aucune raison de penser que les groupes industaerluileterlsesmaedunertai~
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nouveaux venus. Le rendement d'une terre n'est pas indéfiniment
extensible au delà d'une certaine limite, un accroissement de travailleurs
augmenterait le dividende d'une façon moins que proportionnelle,
et diminuerait par conséquent la part de chacun.
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cependant pas admettre l'hypothèse. Dans le système social de
M. Oppenheimer, la contrainte pourrait venir de la communauté
mère, réellement intéressée, comme société de consommation, à
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subordonné aux dimensions de l'entreprise, à l'étendue du
406 LES SYSTÈMES SOCIALISTES ET L'ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE
capital investi, au cercle de la clientèle, aux besoins du service. Or,
dans les exploitations les plus lucratives, et notamment sur les
terres les plus riches, il faudrait dépasser largement cette limite, si
l'on voulait obtenir le nivellement des revenus du travail par la diffusion
de la rente dans le taux général des salaires; sur les vignobles
les plus renommés, par exemple, il faudrait admettre les participants
en nombre tel, que chacun d'eux serait occupé d'une manière insigninante.
Dans un régime d'associations ouvertes distribuant le
profit de l'exploitation aux producteurs, la rente du sol ne pourrait
contribuer à élever le niveau général des salaires qu'à la condition
d'entretenir des parasites parmi les travailleurs. Aussi les associations,
considérant que ces parasites leur seraient plus onéreux comme
producteurs qu'avantageux comme consommateurs, sauraient-elles
leur interdire l'accès de leurs exploitations les plus lucratives, dès que
ces entreprises seraient suffisamment pourvues de personnel. Elles
ne feraient par là que se conformer au véritable intérêt de la société
tout entière, comme à leur propre intérêt; en revanche, elles feraient
.obstacle au nivellement des revenus.
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