Différences entre les versions de « Walter Lippmann:La Cité libre - Chapitre 3 - le gouvernement de la postérité »

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Certes, il est parfois nécesaire de combattre le feu par le feu en incendiant des terrains placés sur le chemin de la conflagration, ou de faire sauter une aile d'une maison dans l'espoir de sauver le reste. Un pays peut se trouver obligé d'élever ses tarifs douaniers lorsque ses voisins les élèvent, de diriger ou de subventionner une industrie de plus, parce qu'il y en a déjà d'autres nationalisées ou subventionnées. Mais un homme qui se meut dans un cercle vicieux n'est pas un modèle de progrès ; et s'il se persuade qu'il doit continuer à tourner, il n'en devient pas pour cela un novateur éclairé.
Certes, il est parfois nécesaire de combattre le feu par le feu en incendiant des terrains placés sur le chemin de la conflagration, ou de faire sauter une aile d'une maison dans l'espoir de sauver le reste. Un pays peut se trouver obligé d'élever ses tarifs douaniers lorsque ses voisins les élèvent, de diriger ou de subventionner une industrie de plus, parce qu'il y en a déjà d'autres nationalisées ou subventionnées. Mais un homme qui se meut dans un cercle vicieux n'est pas un modèle de progrès ; et s'il se persuade qu'il doit continuer à tourner, il n'en devient pas pour cela un novateur éclairé.


Depuis plus de deux générations, la contrainte croissante de l'organisation sociale a coincidé avec un désordre croissant. Il est temps de rechercher pourquoi, avec tant d'autorité en plus, il y a tant de stabilité en moins ; pourquoi, avec de telles promesses d'abondance, le niveau de vie s'élève beaucoup moins vite, et en beaucoup d'endroits, s'abaisse ; pourquoi, lorsque l'organisation est presque parfaite, la notion officielle de la civilisation n'est pas universellement admise.
Depuis plus de deux générations, la contrainte croissante de l'organisation sociale a coincidé avec un désordre croissant. Il est temps de rechercher pourquoi, avec tant d'autorité en plus, il y a tant de stabilité en moins ; pourquoi, avec de telles promesses d'abondance, le niveau de vie s'élève beaucoup moins vite, et en beaucoup d'endroits, s'abaisse ; pourquoi, lorsque l'organisation est presque parfaite, la notion officielle de la civilisation n'est pas universellement admise. On prétend que c'est le « chaos » qui rend inévitable le recours à l'autorité. Cela ne peut pas être vrai, bien que dans les cas d'urgence, l'autorité soit parfois le seul remède. Car si c'était vrai l'accroissement de la contrainte organisée pendant les trois dernières générations aurait produit un certain accroissement de stabilité. Mais le désordre est aujourd'hui plus grand que lorsqu'on a commencé à administrer le remède, et il faut par conséquent présumer que c'est la contrainte qui crée le chaos qu'elle prétend maîtriser.
 
Ce n'est pas par hasard que le culte d'une civilisation autoritaire s'accompagne d'un pressentiment que la civilisation moderne est condamnée. Pourquoi, au moment om l'homme prétend si ambitieusement être capable de planifier et de diriger la société, a-t-il si profondément l'impression que les affaires humaines sont indirigeables ? Cette prétention et ce désespoir ne sont-ils pas complémentaires ? La confiance des hommes est grossie par leur espoir, et leur désespoir aggravé par leurs prétentions.


== Notes et références ==  
== Notes et références ==  
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