Différences entre les versions de « Walter Lippmann:La Cité libre - Chapitre 10 - la débâcle du libéralisme »

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==La science funeste==
==La science funeste==
Les libéraux du XIXe siècle, qui avaient entrevu la Terre Promise, s'y crurent arrivés. Ils constataient en effet les progrès étonnants réalisés dans tous les domaines de l'activité humaine. Le niveau de vie général s'améliorait, en même temps que s'élevait le sens de la dignité humaine, et que s'effectuait une série de découvertes et d'inventions scientifiques considérables.
Les libéraux du XIXe siècle, qui avaient entrevu la Terre Promise, s'y crurent arrivés. Ils constataient en effet les progrès étonnants réalisés dans tous les domaines de l'activité humaine. Le niveau de vie général s'améliorait, en même temps que s'élevait le sens de la dignité humaine, et que s'effectuait une série de découvertes et d'inventions scientifiques considérables. Nous ne nous rendons plus très bien compte aujourd'hui, habitués que nous sommes à tous ces résultats, que le XIXe siècle a été l'une des plus grandes périodes créatrices de l'histoire. Nos arrière-grands-parents qui se souvenaient encore du passé, le comprenaient fort bien. Les dithyrambes des libéraux nous paraissent aujourd'hui très excessifs. Soyons justes et souvenons-nous qu'ils avaient sous les yeux les magnifiques résultats obtenus à leur époque, alors que nous ne voyons plus que les graves problèmes qu'ils ont négligés et qu'ils nous ont laissé à résoudre.
 
Leur science sociale n'a pu leur fournir de ligne de conduite pratique parce qu'ils se sont laissé absorber par le faux problème du laissez faire. Ils se sont de plus égarés dans une autre erreur qui, elle aussi, a été fatale au développement de la science libérale. De même qu'ils avaient supposé que l'économie de la division du travail fonctionne en vertu de lois naturelles en dehors de tout système juridique, de même ils supposèrent que ces lois naturelles étaient celles qu'ils avaient formulées dans leurs ouvrages de science économique. C'est l'erreur de l'économie classique qui, venue de David Ricardo, a pénétré les idées des hommes d'affaires prospères, des hommes d'Etat conservateurs, et d'une grande partie de la jurisprudence des soixante-dix dernières années. Cette erreur était plus subtile mais tout aussi nocive que celle portant sur le dogme du laissez faire. Elle consistait à tirer des conclusions pratiques immenses de la première phase d'une recherche scientifique inachevée.


== Notes et références ==  
== Notes et références ==  
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