Gustave de Molinari:Les Soirées de la rue Saint-Lazare - Quatrième soirée

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Gustave de Molinari:Les Soirées de la rue Saint-Lazare - Quatrième soirée
Les Soirées de la rue Saint-Lazare
Entretiens sur les lois économiques et défense de la propriété


Anonyme
Gustave de Molinari
Membre de la Société d'économie politique de Paris


Quatrième soirée

Interlocuteurs : Un conservateur. — Un socialiste. — Un économiste

Droit de tester. — Législation qui régit l'héritage. — Le droit à l'héritage. — Ses résultats moraux. — Ses résultats matériels. — Comparaison de l'agriculture française avec l'agriculture britannique. — Des substitutions et de leur utilité. — Organisation naturelle des exploitations agricole sous un régime de propriété libre.

L'ÉCONOMISTE.

Ceux qui se sont arrogé le droit de limiter la propriété n'ont pas manqué d'en limiter aussi la libre disposition. Le don, le test, le prêt et l'échange ont été soumis à une multitude d'entraves.

Le don de certaines propriétés est assujetti à des formalités gênantes et coûteuses. Le test est plus entravé encore. Au lieu de laisser au père de famille la libre disposition de ses biens, la loi lui enjoint de les léguer par portions à peu près égales à ses enfants légitimes. Si l'un des enfants se trouve lésé dans le partage, il a le droit de faire casser le testament [1].

LE CONSERVATEUR.

Vous attaquez donc aussi cette loi protectrice de la famille et de la propriété.

L'ÉCONOMISTE.

J'attaque cette loi destructrice de la famille et de la propriété. C'est au nom d'un droit supérieur à celui des pères de famille, que la société a réglé les héritages, n'est-il pas vrai ? Mais pourquoi donc n'userait-elle pas de ce droit supérieur pour s'attribuer demain cette propriété dont elle a disposé hier ? Si elle a pu dire au père de famille : tu ne disposeras pas de tes biens selon ta volonté, mais selon la mienne ; ne peut-elle pas bien lui dire aussi : il me convient désormais que tu disposes de ta propriété en ma faveur. L'abolition de l'héritage, c'est-à-dire la suppression de la propriété individuelle, n'est-elle pas contenue dans une loi qui attribue à la société le droit de disposer souverainement de l'héritage ?

L'annihilation de l'autorité paternelle, c'est-à-dire la destruction de la famille, n'est-elle pas contenue de même, dans une loi qui retire au père de famille la libre disposition de ses biens pour accorder aux enfants un véritable droit à l'héritage.

LE CONSERVATEUR.

Un droit à l'héritage, dites-vous ?

L'ÉCONOMISTE.

Dire aux enfants : vous avez le droit d'exiger de votre père des parts à peu près égales d'héritage, quelle qu'ait été votre conduite, quels que soient vos sentiments à son égard ; vous avez le droit de faire casser son testament si vous vous trouvez lésés dans le partage, n'est-ce pas consacrer le droit à l'héritage ? n'est-ce pas donner à l'enfant une action sur la propriété de son père ? n'est-ce pas lui permettre de considérer et d'exiger comme une dette, ce qu'il regardait et ce qu'il recevait naguère comme un bienfait ? Où la nature avait mis un fils, votre loi ne met-elle pas un créancier ?

LE CONSERVATEUR.

Mais n'est-ce rien d'obliger le père à partager équitablement son héritage entre ses enfants ? Sans la loi qui règle les partages, les enfants ne seraient-ils pas incessamment frustrés de leur légitime par des fraudes ou des captations ? La loi n'a-t-elle pas prévenu toutes les fraudes, tranché toutes les difficultés.

L'ÉCONOMISTE.

En brisant le lien des familles ; en rendant illusoire l'autorité du père. Si le droit de tester était libre, le père pourrait sans doute mal disposer de sa fortune. Mais n'est-il pas retenu toujours par ces freins puissants qu'aucune loi fabriquée de main d'homme ne saurait remplacer, l'amour paternel et le sentiment de la justice ? Si ces deux sentiments se taisent au dedans de lui-même, croyez-vous que votre loi les fera parler ? croyez-vous que le père ne trouvera point quelque moyen détourné de disposer de sa fortune au détriment de ses enfants ? S'ils y sont vivaces, à quoi bon votre loi ? Et puis, vous posez en principe l'égalité des partages comme l'idéal de l'équité, mais êtes-vous bien sûr que cette égalité brutale soit toujours de la justice ? Êtes-vous bien sûr qu'un père ne puisse favoriser un de ses enfants sans spolier les autres ? En admettant même que le fils ait virtuellement quelque droit sur les biens de son père...

LE CONSERVATEUR.

Quoi ! le fils n'aurait aucun droit sur l'héritage paternel ? Mais s'il en était ainsi, on pourrait donc le dépouiller, en l'absence d'un testament.

L'ÉCONOMISTE.

La conséquence est fausse. Le droit des enfants se fonde, en ce cas, sur la probabilité du legs. L'héritage doit leur revenir, non parce qu'ils possèdent un droit virtuel sur cet héritage, mais parce que le père le leur aurait probablement légué.

En donnant naissance à un enfant, le père contracte envers lui l'obligation morale de le nourrir et de le mettre en état de vivre de son travail, rien de plus, rien de moins. S'il lui plaît de donner quelque chose en sus à son enfant, c'est un effet de son bon plaisir.

Mais en admettant même votre prétendu droit à l'héritage, croyez-vous qu'un mauvais fils ait sur l'héritage paternel le même droit qu'un bon fils ? croyez-vous qu'un père soit tenu, au point de vue de l'équité naturelle, de léguer une partie de son bien au misérable qui aura fait le désespoir et la honte de sa famille ? croyez-vous qu'il ne sera pas tenu, au contraire, de priver cet être dégradé des moyens d'assouvir ses passions malfaisantes ? L'usage du droit de déshériter ne peut-il être quelquefois utile et juste ?

Mais aux yeux de vos législateurs, le père est un être dépourvu à la fois de la notion de la justice et du sentiment paternel. C'est une bête féroce qui guette incessamment sa progéniture pour la dévorer. Il faut que la loi intervienne pour la protéger ; il faut que la société lie les pieds et les mains à ce barbare sans entrailles qu'on appelle un père, pour l'empêcher de sacrifier son innocente famille à ses immondes appétits.

Ils n'ont pas vu, ces tristes législateurs, que leur loi n'aurait d'efficacité que pour affaiblir le respect de l'autorité et le sentiment de la famille. Le respect de l'autorité existe-t-il encore en France ?

LE CONSERVATEUR.

Ah ! vous venez de toucher à la plus lamentable plaie de notre époque. La génération actuelle a perdu le respect de l'autorité ; oui, cela n'est que trop vrai. Quels admirables articles l'Union a publiés là-dessus. Le respect de l'autorité ! qui nous le rendra ? Le fils ne respecte plus son père. L'homme fait ne respecte plus rien, pas même Dieu. Le respect de l'autorité, voilà l'ancre de salut de notre société ballottée au sein de la tourmente révolutionnaire comme un navire qui.....

LE SOCIALISTE.

Ah ! de grâce, laissez, nous avons lu les articles de l'Union.

L'ÉCONOMISTE.

Cette ancre de salut, vous l'avez brisée de vos propres mains le jour où vous avez porté atteinte aux droits sacrés des pères de famille ; le jour où vous avez donné au fils une action sur la propriété de son père ; le jour où, en enlevant à celui-ci l'arme redoutable de l'exhérédation, vous l'avez livré à la merci des rébellions de ses enfants.

LE CONSERVATEUR.

Et la maison de correction ?

L'ÉCONOMISTE.

Oui, vous la lui avez donnée en échange. Mais, à moins d'avoir perdu tout sentiment humain, un père peut-il consentir à mettre son fils dans ce grand chemin du bagne ? Mieux vaut souffrir une rébellion que d'attirer l'infamie sur soi et sur les siens.

Je sais bien que le père peut défier votre loi et déshériter en fait son fils rebelle s'il ne le peut en droit ; mais il est obligé d'agir dans l'ombre et d'éviter l'œil avide et jaloux de son créancier. Il n'use plus du droit légitime de disposer de son bien ; il porte une atteinte immorale au droit de son fils sur ce bien. Sa conduite n'est plus celle d'un propriétaire disposant souverainement d'un domaine libre ; c'est la conduite d'un débiteur qui aliène subrepticement une propriété hypothéquée. Ce qui ferait respecter l'autorité paternelle, si le droit à l'héritage n'existait point, ne peut plus aujourd'hui que l'avilir.

Je ne vous parlerai point des haines qui surgissent dans les familles, lorsqu'un père juge à propos de favoriser un de ses enfants. Dans les pays où le droit à l'héritage n'existe pas, aux États-Unis par exemple, les autres enfants courbent respectueusement la tête devant cet acte souverain de la volonté paternelle et ils ne conçoivent aucun mauvais sentiment contre l'enfant que le père a favorisé ; dans les pays où le droit à l'héritage est reconnu, un tel acte devient au contraire une cause profonde de désunion dans la famille. En effet, cet acte si simple et souvent si bien justifié par les circonstances, la faiblesse ou l'incapacité de l'enfant préféré, les soins qu'il a rendus au père, n'est-il pas, au point de vue de votre légalité, une véritable spoliation, un vol ? Nouvelle harpie, votre loi a corrompu les sentiments de la famille, en les touchant ! Plaignez-vous après cela de ce que le désordre que vous avez jeté dans la famille s'est propagé dans la société ?

LE CONSERVATEUR.

Mais si les résultats moraux de la loi sur l'égalité des partages laissent quelque chose à désirer, cette loi n'a-t-elle pas eu d'admirables résultats économiques ? Tout le monde est devenu propriétaire. Chaque paysan ayant son lopin de terre à cultiver s'est trouvé à l'abri du besoin.

L'ÉCONOMISTE.

En êtes-vous bien sûr ? Pour moi, je tiens qu'aucune loi n'a agi d'une manière plus funeste sur la condition des classes laborieuses, manufacturières ou agricoles ?

LE CONSERVATEUR.

Aimeriez-vous mieux, par hasard, le droit d'aînesse et les subventions ?

L'ÉCONOMISTE.

C'est un autre genre d'abus ; une autre sorte d'atteintes au droit de propriété ; mais, je crois bien, en vérité, que je les préférerais.

LE SOCIALISTE.

Il est certain que le morcellement est la plaie de notre agriculture, que l'Association est notre seule planche de salut.

L'ÉCONOMISTE.

Je pense comme vous.

LE CONSERVATEUR.

Comment ? Vous préférez le régime féodal du droit d'aînesse et des substitutions à l'égalité des partages, et vous êtes pour l'association. Voilà une contradiction manifeste.

L'ÉCONOMISTE.

Je ne le pense pas. Quelles sont les conditions essentielles de toute production économique ? La stabilité, la sécurité dans la possession d'une part ; la concentration de forces productives suffisantes de l'autre. Or, le régime actuel ne comporte ni stabilité ni concentration suffisante des forces productives.

LE CONSERVATEUR.

Je conviens avec vous que les baux sont à de trop courts termes, et que notre loi sur l'héritage a rendu la possession indivise d'une exploitation territoriale, singulièrement précaire ; je conviens aussi que l'agriculture manque de capitaux, mais qu'y faire ? On a parlé de l'organisation du crédit agricole, et pour ma part, j'y inclinerais assez s'il n'était si difficile de trouver un bon système.

L'ÉCONOMISTE.

Un système de crédit agricole, si excellent qu'il fut, ne remédierait à rien. Avec le régime actuel de la propriété, c'est à peine si la multiplication des institutions de crédit ferait baisser le taux de l'intérêt dans nos campagnes. Il en serait autrement si nos exploitations agricoles étaient solidement assises, comme elles le sont en Angleterre.

LE SOCIALISTE.

Vous osez nous proposez l'Angleterre pour modèle. Ah ! certes, la situation des ilotes de nos campagnes est bien misérable, mais n'est-elle pas mille fois préférable à celle des paysans anglais ? Les travailleurs anglais ne sont-ils pas exploités par une aristocratie qui dévore leur substance comme le vautour dévorait le foie de Prométhée ? L'Angleterre n'est-elle pas le pays où se jouent les plus tristes scènes du sombre drame de l'exploitation de l'homme par l'homme ? L'Angleterre n'est-elle pas la grande prostituée du capital ? L'Angleterre ! ah ! ne me parlez pas de l'Angleterre ?

L'ÉCONOMISTE.

Cependant la condition du paysan anglais, exploité par l'aristocratie, est infiniment supérieure à celle du paysan indépendant, propriétaire de France.

LE CONSERVATEUR.

Allons donc !

L'ÉCONOMISTE.

J'aperçois dans votre bibliothèque deux ouvrages de MM. Mounier et Rubichon sur l'Agriculture en France et en Angleterre, et sur l'Action de la noblesse dans les sociétés modernes, qui me fourniront des preuves irrécusables à l'appui de ce que j'avance.

LE CONSERVATEUR.

J'avoue humblement ne les avoir pas lus.

L'ÉCONOMISTE.

Vous avez eu tort. Vous y auriez trouvé toutes les lumières nécessaires pour vider la question qui nous occupe. C'est un résumé des volumineuses enquêtes publiées par ordre du parlement anglais sur la situation de l'agriculture et la condition des agriculteurs. Je feuillette au hasard. Voici un extrait de l'enquête la plus récente (1846).

Le président s'adresse à M. Robert Baker, fermier dans le comté d'Essex, qui cultive une terre de 230 hectares.
D. Quelle est la nourriture générale des ouvriers agricoles ?
R. Ils se nourrissent de viande et de pommes de terre ; mais si la farine est à bon marché, ils ne consomment point de pommes de terre ; cette année (1846) il mangent le meilleur pain blanc.
M. Robert Ilyde-Gregg, qui est depuis vingt ans un des plus grands manufacturiers de la Grande-Bretagne, donne à son tour les renseignements suivants sur la situation des ouvriers des manufactures.
D. Quand vous dites qu'il se consomme beaucoup de pommes de terre dans les districts de manufacture, entendez-vous que ces pommes de terre sont, comme en Irlande, le fond de la nourriture du peuple, où sont-elles mangées avec de la viande ,
R. En général, le dîner se compose de pomme de terre et de porc, le déjeuner et le souper de thé et de pain.
D. Les ouvriers ont-ils, en général, du porc ?
R. Je puis dire que tous mangent de la viande à dîner.
D. Depuis que vous observez, y a-t-il eu un changement considérable dans la nourriture des ouvriers manufacturiers ; ont-ils substitué la farine de froment à la farine d'avoine ?
R. Certainement, ce changement a eu lieu. Je me rappelle que dans toutes les maisons d'ouvriers on voyait des galettes suspendues en l'air ; il n'y a plus rien de semblable.
D. La population d'aujourd'hui a donc, sous le rapport du pain, amélioré sa nourriture, puisqu'elle consomme de la farine de froment au lieu de farine d'avoine ?
R. Oui, complètement.

Voici maintenant un témoignage relatif à la situation des ouvriers de France et d'Angleterre.

M. Joseph Cramp, expert pour estimer les terres dans le comté de Kent, et fermier depuis quarante-quatre ans, a été en France et il s'y est appliqué à connaître l'état de l'agriculture. On l'interroge sur la condition des ouvriers agricoles en Normandie.
D. D'après vos observations sur l'état des ouvriers en Normandie, pensez-vous qu'ils soient mieux habillés et mieux nourris que les ouvriers dans l'île de Thanet que vous habitez ?
R. Non. J'ai été dans leurs habitations, et je les ai vus à leurs repas qui sont tels que jamais, je l'espère, je ne verrai un Anglais assis à si mauvaise table.
D. Les ouvriers dans l'île de Thanet mangent le meilleur pain blanc, n'est-ce pas ?
R. Toujours.
D. Et en Normandie, les ouvriers agricoles n'en mangent-ils pas ?
R. Non. Ils mangeaient du pain dont la couleur approchait de celle de cet encrier.
D. Combien d'hectolitres de froment récolte-t-on par hectare dans l'île de Thanet ?
R. Environ vingt-neuf hectolitres.
D. Ayant habité et cultivé si longtemps dans l'île de Thanet, pouvez-vous dire si la condition des classes ouvrières s'est améliorée ou s'est empirée, depuis le moment que vous avez connu ce pays ?
R. Elle s'est améliorée.
D. Sous tous les rapports ?
R. Oui.
D. Vous pensez donc que les ouvriers sont mieux habillés et mieux élevés.
R. Mieux nourris, mieux habillés et mieux élevés.


Vous voyez que la condition des populations agricoles de l'Angleterre est infiniment supérieure à celle des nôtres. Comment ce fait s'explique-t-il ? Ces populations ne sont pas propriétaires du sol. La terre de la Grande-Bretagne appartient à trente-cinq ou trente-six mille propriétaires, descendant pour la plupart des anciens conquérants.

LE SOCIALISTE.

Oui, le sol de l'Angleterre appartient à l'aristocratie, et le peuple anglais paye chaque année deux ou trois milliards à cette caste orgueilleuse et fainéante pour avoir le droit de cultiver le sol.

L'ÉCONOMISTE.

C'est bien un peu cher. Aussi les Anglais ont-ils commencé à rogner la portion de leurs landlords, en supprimant les lois-céréales. Cependant, vous allez voir que, même à ce prix abusivement surélevé, les Anglais ont trouvé un réel avantage à conserver leur aristocratie, tandis que nous commettions la faute de supprimer hâtivement la nôtre.

LE SOCIALISTE.

Oh ! oh !

L'ÉCONOMISTE.

Laissez-moi achever. De quelle manière les Anglais sont-ils parvenus à tirer de leur sol beaucoup plus et de meilleures subsistances que nous n'en tirons du nôtre ? C'est en perfectionnant leur agriculture. C'est en faisant subir à leurs exploitations agricoles une série de transformations progressives.

LE CONSERVATEUR.

Quelles transformations ?

L'ÉCONOMISTE.

Les propriétaires de la Grande-Bretagne ont successivement substitué à leurs petites fermes, alimentées par des capitaux insuffisants, de grandes fermes alimentées par des capitaux considérables. C'est grâce à cette substitution économique de la manufacture agricole au petit atelier que le progrès s'est accompli. Je trouve dans l'enquête reproduite par MM. Mounier et Rubichon, les renseignements suivants sur la répartitions de la population dans la Grande-Bretagne :

Familles occupées à l'agriculture, 961 134 Familles employées par l'industrie, le commerce, etc., 2 453 041

Ces 961 134 familles employées à l'agriculture fournissent 1 055 982 travailleurs effectifs qui cultivent 13 849 320 hectares de terres et dont naître un produit de 4 000 500 000 francs.

En France, l'agriculture ne donnait en 1840 qu'un produit total de 3 523 861 000 francs, et cependant elle était exercée par une population de dix-huit millions d'individus donnant cinq à six millions de travailleurs effectifs. Ce qui signifie que le travail d'un ouvrier agricole français est quatre à cinq fois moins productif que le travail d'un ouvrier agricole de l'Angleterre. Vous devez comprendre maintenant pourquoi nos populations sont plus mal nourries que celles de la Grande-Bretagne.

LE SOCIALISTE.

Vous ne tenez aucun compte du tribut énorme que les agriculteurs anglais payent à l'aristocratie.

L'ÉCONOMISTE.

Si, comme l'attestent les statistiques, les populations agricoles de l'Angleterre sont mieux nourries que les nôtres, nonobstant le tribut qu'elles payent à l'aristocratie, n'est-ce pas une preuve incontestable qu'en produisant davantage elles reçoivent aussi davantage ?

LE CONSERVATEUR.

C'est évident.

L'ÉCONOMISTE.

Et s'il est vrai que c'est au maintien de l'aristocratie, que l'agriculture britannique doit ses immenses et rapides progrès ; s'il est vrai que le maintien de l'aristocratie est cause qu'un ouvrier agricole produit et reçoit plus en Angleterre qu'en France, l'Angleterre n'a-t-elle pas eu raison de maintenir son aristocratie ?

LE CONSERVATEUR.

Mais, au moins, le paysan français est propriétaire du sol.

L'ÉCONOMISTE.

Est-il préférable de gagner dix sur sa propre terre, ou de gagner vingt sur celle d'un propriétaire étranger ?

LE CONSERVATEUR.

Il est préférable de gagner vingt, n'importe où.

LE SOCIALISTE.

Fort bien ! mais y a-t-il véritablement un rapport essentiel entre ces deux choses, maintien de l'aristocratie et progrès de l'agriculture britannique ? N'est-il pas vraisemblable que l'agriculture britannique aurait réalisé de plus grands progrès encore, si l'Angleterre s'était débarrassée de son aristocratie, comme nous nous sommes débarrassés de la nôtre ? L'agriculture française n'a-t-elle pas progressé depuis 89 ?

L'ÉCONOMISTE.

Je ne le pense pas. MM. Mounier et Rubichon affirment résolument qu'au lieu de progresser, elle a rétrogradé. Un champ qui rendait 10 avant 1789, disent-ils, ne rend plus que 4 aujourd'hui ; peut-être exagèrent-ils le mal. Mais voici un fait incontestable : si la quantité des subsistances produites à l'aide d'une même quantité de travail n'a pas diminué, la qualité de la masse générale des subsistances a baissé. La consommation de la viande a notoirement diminué. A Paris même, dans ce foyer où convergent les forces productives de la France, on mange moins de viande qu'en 1789. Selon Lavoisier, la moyenne de la consommation de Paris (volailles et gibier compris) était alors de 81,50 kil. par tête ; en 1838, elle n'était plus que de 62,30 kil. La baisse n'a pas été moins sensible dans le reste du pays. D'après d'anciens documents cités par la statistique impériale, la consommation moyenne de chaque habitant de la France (non compris la charcuterie) était, en 1780, de 13,13 kil. ; en 1830 elle n'était plus que de 12,36 kil., et en 1840 de 11,29 kil. La consommation d'une viande inférieure, la chair de porc, a, au contraire, augmenté. On en consomme actuellement 8,65 kil. par tête.

En définitive, la consommation de la viande en France ne va qu'à 20 kil. par tête. Aux États-Unis, la moyenne est de 122 kil. En Angleterre, 68 — En Allemagne, 55 —

De plus, il est probable que notre consommation ira sans cesse diminuant, si notre régime agricole demeure le même ; car le prix de la viande hausse progressivement.

En divisant la France en neuf régions, le prix de la viande a haussé de 1824 à 1840 :

Dans la première région, le nord-ouest de 11 p.%

Dans la deuxième, nord de 22 —

Dans la troisième, nord-est de 28 —

Dans la quatrième, ouest de 17 —

Dans la cinquième, centre de 19 —

Dans la sixième, est de 21 —

Dans la septième, sud-ouest de 23 —

Dans la huitième, sud de 30 —

Dans la neuvième, sud-est de 38 — [2]

Or, vous savez que l'élévation du chiffre de la consommation de la viande est le plus sûr indice de la prospérité d'un peuple.

LE SOCIALISTE.

J'en tombe d'accord avec vous, mais encore une fois montrez-vous bien clairement la relation qui existe, selon vous, entre la décadence de notre agriculture et notre loi d'égalité des partages. Comment ceci a-t-il amené cela ?

L'ÉCONOMISTE.

J'ai oublié encore une circonstance c'est que notre sol est naturellement plus fertile que le sol britannique.... Je réponds à votre question. L'Angleterre doit la stabilité de ses exploitations agricoles au maintien de son aristocratie et aux lois qui assurent chez elle, partiellement du moins, la liberté de l'héritage.

LE CONSERVATEUR.

La liberté de l'héritage, dites-vous. Et les substitutions, et le droit d'aînesse ?...

L'ÉCONOMISTE.

Sont parfaitement libres en ce sens qu'aucune loi n'oblige le père de famille à les établir. C'est la coutume qui en décide, et cette coutume est fondée sur des nécessités économiques.

Voici en quoi consistent les substitutions :

A l'époque du mariage de son fils aîné, le plus souvent, ou à toute autre époque qu'il lui convient de choisir, le propriétaire d'un domaine lègue sa propriété à l'aîné de ses petits-fils, ou, à défaut d'enfants mâles, à l'aînée de ses petites-filles. Si, au moment de la substitution, le propriétaire a un fils et un petit-fils vivants, il peut la faire remonter à un degré plus haut et désigner son arrière-petit-fils ; ou son arrière petite-fille. Mais son droit reconnu n'atteint que la première génération à naître. En Écosse, ce droit est sans limites. Un propriétaire peut substituer son bien à perpétuité.

L'acte de substitution accompli, le propriétaire et ses héritiers vivants perdent la libre disposition de la terre, ils n'en sont plus que les usufruitiers. Il ne peuvent ni la grever d'hypothèques ni la vendre en tout ou partie. Un bien substitué ne peut être ni saisi ni confisqué. On le considère comme un legs sacré qu'il n'est permis à personne de détourner de sa destination.

A l'âge de vingt-un ans, l'héritier en faveur duquel la substitution a été opérée peut la rompre ; mais il ne la rompt communément que pour la renouveler, en y introduisant certaines clauses nécessitées par la situation présente de la famille. Les propriétés passent, de la sorte, indivises, intactes, de génération en génération.

Voici maintenant à quoi servent les substitutions.

Elles donnent aux exploitations agricoles ce qui manque aux nôtres, la stabilité. En France tout est viager, en Angleterre tout est perpétuel. Nos exploitations agricoles sont exposées incessamment à être morcelées par un partage ; les exploitations britanniques n'ont à courir aucun risque de cette nature.

LE CONSERVATEUR.

Ce risque a-t-il bien toute l'importance que vous lui attribuez ? Il importe assez peu que la terre soit plus ou moins morcelée, si elle est bien cultivée.

L'ÉCONOMISTE.

Consultez les agriculteurs, et tous vous diront que les cultures doivent avoir une certaine étendue pour être exploitées avec un maximum d'économie. Cela se conçoit. On ne peut employer les méthodes et les instruments perfectionnés que dans une vaste exploitation. En Angleterre, les fermes ordinaires ont trois cent cinquante ou quatre cents hectares. Ces fermes sont munies d'un capital considérables. En France, le nombre de ces grandes exploitations est excessivement restreint.

LE CONSERVATEUR.

Pourquoi ?

L'ÉCONOMISTE.

Celui qui fonde une exploitation agricole ignore si elle ne sera point morcelée, détruite à sa mort. Il ne peut rien faire pour la préserver du morcellement. La loi n'a-t-elle pas limité son droit de tester ? Il est donc peu excité à appliquer de grands capitaux à l'agriculture. Le fermier l'est-il davantage ? En France les baux sont de très courtes durée : c'est merveille de voir un bail de vingt-un ans. Je n'ai pas besoin de vous expliquer la raison de cette courte durée des baux ; vous la devinez ! Quand la possession même est à courte échéance, il n'est pas possible de stipuler un long bail. Mais lorsqu'un fermier n'occupe une terre que pour trois, six ou neuf ans, il y applique le moins de capital possible ; il économise les engrais, il n'élève pas de clôtures, il ne renouvelle pas son matériel ; d'un autre côté, il épuise la terre autant que faire se peut.

En Angleterre, la stabilité que le régime des substitutions a donnée aux exploitations agricoles, a engendré la stabilité des fermages, les baux à long terme. Aussi les fermiers, bien assurés de recueillir eux-mêmes les fruits qu'ils ont semés, appliquent-ils généralement leurs économies à féconder le sol.

LE SOCIALISTE.

Cependant le fermier est soumis, en Angleterre comme en France, à la tyrannie des propriétaires.

L'ÉCONOMISTE.

Oui, mais cette tyrannie est fort douce. Il y a, en Angleterre, des fermiers qui tiennent la même ferme, de père en fils, depuis un temps immémorial. La plupart n'ont point de bail, tant est profonde la confiance que leur inspirent les propriétaires du sol. Rarement cette confiance est trompée, rarement un propriétaire se décide à expulser un fermier que des liens séculaires attachent à sa famille. Il y a toutefois, en Angleterre comme ailleurs, différents modes de tenure. Dans le nord, le système des baux pour la vie de trois personnes est généralement usité ; le fermier se désigne lui-même, ainsi que deux de ses enfants, et le bail court jusqu'à la mort du dernier des trois. La durée moyenne de ces baux est estimée à cinquante-quatre ans. Lorsqu'un des enfants désignés vient à mourir, le fermier obtient ordinairement l'autorisation de substituer un autre nom à celui du défunt, et de prolonger ainsi la durée du bail.

Quand le bail est à terme fixe, la durée en est communément déterminée par celle des assolements. Pour les assolements de six et neuf elle est de dix-neuf ans, mais il est rare que le bail ne soit point renouvelé.

Les fluctuations considérables auxquelles le prix du blé se trouve exposé depuis quelque temps ont donné naissance à une nouvelle espèce de baux ; je veux parler des baux mobiles, variant d'années en année selon le cours des céréales. Une ferme se louera, par exemple, pour la valeur de mille quarters de blé ; si, en 1845, le prix du blé est de 56 schell. le quarter, le fermier payera 2 800 liv. sterl. de fermage ; si, en 1846, le prix monte à 60 schell., il payera 3 000 liv. sterl. On choisit pour ces évaluations le prix moyen du blé dans le comté.

On conçoit que les fermiers hasardent sans crainte leurs capitaux dans des entreprises si solidement assises. On conçoit aussi que les capitalistes leur en prêtent volontiers. Les gros fermiers trouvent généralement à emprunter à quatre pour cent, et même à trois. On ne court, en effet, presque aucun risque à placer ses capitaux sur la terre. Les exploitations ne sont pas exposées à perdre de leur valeur par le morcellement ou la vente pour sortir de l'indivision. Fermiers et propriétaires étant établis, pour ainsi dire, à perpétuité, offrent un maximum de garanties aux prêteurs. De là la modicité du taux de l'intérêt agricole ; de là aussi le nombre considérable de banques qui se sont établies pour servir d'intermédiaires entre les capitalistes et les entrepreneurs d'industrie agricole, propriétaires ou fermiers.

Le peuple anglais, qu'on vous représente sans cesse comme privé de la propriété de la terre de la Grande-Bretagne, possède, en réalité, beaucoup plus de valeurs territoriales que le peuple français lui-même. S'il n'emploie pas ses capitaux à acheter des fonds de terre, il les place sur ces fonds mêmes, dont il augmente ainsi les forces productives.

En France, au contraire, on achète de la terre, mais on ne place guère ses capitaux sur la terre. Il n'en saurait être autrement. On ne prête pas volontiers à un petit fermier, dont l'existence n'est à demi assurée que pour quelques années ; on hésite même à prêter au petit propriétaire dont la faible parcelle de terrain peut, du jour au lendemain, être morcelée de nouveau entre plusieurs héritiers. Ajoutez à cela les formalités coûteuses, les lenteurs et l'insécurité du prêt hypothécaire, et vous aurez l'explication de l'élévation du taux de l'intérêt agricole.

LE CONSERVATEUR.

Oui, l'usure ronge nos campagnes.

L'ÉCONOMISTE.

L'usure soit ! Mais examinez de quoi se composent les dix ou quinze pour cent que nos agriculteurs payent aux usuriers, pesez les risques de perte et les menus frais, et vous vous convaincrez que cette usure n'a rien d'illégitime, vous vous convaincrez qu'eu égard à l'étendue et à l'intensité des risques agricoles, l'intérêt des prêts faits à l'agriculture ne dépasse aucunement l'intérêt des prêts ordinaires. Or, comme les banques agricoles dont on s'est engoué ne détruiront pas ces risques, elles ne contribueront que faiblement à abaisser le taux de l'intérêt agricole.

LE CONSERVATEUR.

Qu'y a-t-il donc à faire pour restituer à nos exploitations territoriales la sécurité qu'elles ont perdue ? faut-il rétablir les substitutions ?

L'ÉCONOMISTE.

A Dieu ne plaise ! il faut, avant tout, restituer aux propriétaires le droit de disposer librement de leurs propriétés. On ralentira ainsi le morcellement, et l'on donnera aux exploitations un peu de cette stabilité précieuse qui leur manque aujourd'hui. Les capitaux viendront alors plus aisément à l'agriculture, et ils se feront payer moins cher. Si en même temps on débarrasse le sol des lourds impôts qui le grèvent, si l'on améliore notre régime hypothécaire, si l'on affranchit les associations industrielles et agricoles des entraves auxquelles la législation impériale les a soumises, on verra s'opérer bientôt une véritable révolution dans notre agriculture. Des compagnies nombreuses se formeront pour l'exploitation du sol, comme il s'en est formé pour l'exploitation des chemins de fer, des mines, etc. Or, ces associations ayant intérêt à s'établir à long terme, les exploitations territoriales acquerront une stabilité presque immuable. Divisée en actions, la propriété de la terre s'échangera, se partagera sans que les cultures en reçoivent la moindre atteinte. L'agriculture se constituera de la manière la plus économique possible.

LE SOCIALISTE.

Oui, l'Association appliquée à l'agriculture mettra fin à nos maux.

L'ÉCONOMISTE.

Nous n'entendons peut-être pas l'association de la même manière. Quoi qu'il en soit, je pense que l'avenir de notre agriculture et de notre industrie appartient à la société anonyme perpétuelle. En dehors de cette forme d'exploitation, à la fois élastique et stable, je ne vois aucun moyen de proportionner toujours l'effort du travail à la résistance de la nature. mais, en attendant qu'elle puisse s'établir, on s'est trop pressé d'en finir avec les institutions anciennes. En détruisant hâtivement les substitutions, en entravant ensuite l'établissement des associations agricoles, on a livré l'agriculture à toutes les misères du morcellement. Exécutée dans des ateliers de plus en plus bornés, la production a rétrogradé au lieu d'avancer. Le travail de l'ouvrier agricole est devenu de moins en moins productif. tandis que l'ouvrier anglais, aidé des machines perfectionnées de la grande industrie agricole, produit cinq, l'ouvrier français ne produit qu'un ou un et demi, et la plus grande partie de ce faible résultat va aux capitalistes qui aventurent leurs capitaux dans nos pauvres ateliers agricoles.

Voilà l'explication de la misère qui ronge les campagnes de la France. Voilà comment il se fait que nous soyons menacés d'une nouvelle Jacquerie. cette Jacquerie, ne l'imputez pas au socialisme, imputez-la aux tristes législateurs, qui, en décrétant d'une main l'égalité des partages, entravaient de l'autre la formation des sociétés industrielles, et accablaient d'impôts les exploitations agricoles. Ceux-là sont les vrais coupables !

peut-être réussirons-nous à éviter les catastrophes que de si lamentables fautes ont préparées, mais il faut se hâter. De jour en jour le mal s'aggrave ; de jour en jour, la situation de la France se rapproche davantage de celle de l'Irlande. Or, nos paysans n'ont pas la longanimité des paysans irlandais.....

LE CONSERVATEUR.

Ah ! nous vivons dans de biens tristes temps. Les campagnes sont pourries.

L'ÉCONOMISTE.

A qui la faute, si ce n'est aux législateurs qui ont porté atteinte à la stabilité de la propriété et à la sainteté de la famille ? Les prédicateurs socialistes auront beau attaquer ces deux institutions sacrées, ils ne leur feront jamais un mal comparable à celui que vous leur avez fait vous-mêmes en inscrivant dans vos Codes le droit à l'héritage.

Notes

[1] Le droit de tester est limité en France, principalement par les articles 913 et 915 du Code civil.

Art. 913. Les libéralités, soit par actes entre vifs, soit par testaments, ne pourront excéder la moitié des biens du disposant, s'il ne laisse à son décès qu'un enfant légitime ; le tiers, s'il laisse deux enfants ; le quart, s'il en laisse trois ou un plus grand nombre.

Art. 915. Les libéralités par actes entre vifs ou par testaments ne pourront excéder la moitié des biens, si, à défaut d'enfants, le défunt laisse un ou plusieurs ascendants dans chacune des lignes paternelle et maternelle ; et les trois quarts, s'il ne laisse d'ascendants que dans une ligne.

Il faut dire toutefois, à la justification des auteurs du Code civil, qu'ils avaient eu des prédécesseurs beaucoup moins libéraux encore. Par une loi du 7 mars 1793, la Convention avait complètement supprimé le droit de tester. Cette loi était ainsi conçue :

Disposition unique. La faculté de disposer de ses biens, soit à cause de mort, soit entre vifs, soit par donation contractuelle en ligne directe, est abolie ; en conséquence, tous les descendants auront un droit égal à partager les biens de leurs ascendants.

Les auteurs du Code civil furent unanimes à reconnaître que cette loi avait porté une grave atteinte à l'autorité paternelle. malheureusement, ils n'osèrent la réformer qu'à demi.

Sous la république romaine, le droit illimité de tester avait été consacré par la loi des Douze tables. Mais diverses atteintes furent successivement portées à ce droit. Justinien limita la portion disponible de l'héritage, au tiers quand il y avait quatre enfants, à la moitié quand il y en avait cinq ou plus.

En Angleterre, il est permis de disposer par testament de tous ses immeubles, sans aucune réserve, et du tiers seulement de ses meubles ; les deux autres tiers appartiennent à la femme et aux enfants. Les propriétés territoriales ne vont de droit à l'aîné de la famille que lorsqu'il n'y a pas de testament.

Aux États-Unis, le droit de tester est entièrement libre.

[2] Discours prononcé par M. Guizot dans la discussion du traité de commerce avec la Sardaigne. — Séance du 31 mars 1845.