Différences entre les versions de « Jean-Baptiste Say:Traité d'économie politique - Livre II - Chapitre VI »

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{{titre|[[Jean-Baptiste Say:Traité d'économie politique|Traité d'économie politique]]|[[Jean-Baptiste Say]]|Livre Second<br />Chapitre VI - Quels genres de production paient plus largement les services productifs.}}
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Il est vrai que les producteurs cherchent toujours à placer leurs services productifs dans les emplois où les profits sont meilleurs, et font ainsi baisser par la concurrence, des prix que la demande tend à élever ; mais leurs efforts ne peuvent pas toujours tellement proportionner les services aux besoins, qu'ils soient, dans tous les cas, également récompensés. Telle industrie est toujours rare dans un pays où le peuple n'y est pas propre ; bien des capitaux se trouvent engagés de manière à ne pouvoir jamais concourir à une autre production que celle à laquelle ils ont été voués dans l'origine : la terre enfin peut se refuser à un genre de culture pour les produits de laquelle il y a beaucoup de demandeurs.
Il est vrai que les producteurs cherchent toujours à placer leurs services productifs dans les emplois où les profits sont meilleurs, et font ainsi baisser par la concurrence, des prix que la demande tend à élever ; mais leurs efforts ne peuvent pas toujours tellement proportionner les services aux besoins, qu'ils soient, dans tous les cas, également récompensés. Telle industrie est toujours rare dans un pays où le peuple n'y est pas propre ; bien des capitaux se trouvent engagés de manière à ne pouvoir jamais concourir à une autre production que celle à laquelle ils ont été voués dans l'origine : la terre enfin peut se refuser à un genre de culture pour les produits de laquelle il y a beaucoup de demandeurs.


Il est impossible de suivre les variations des profits dans tous les cas particuliers ; ils peuvent subir des variations extrêmes en raison d'une découverte importante, d'une invasion, d'un siége. L'influence de ces circonstances particulières se combine avec l'influence des causes générales, mais ne la détruit pas. Un traité, quelque volumineux qu'on le suppose, ne saurait prévoir tous les cas particuliers qui peuvent influer sur la valeur des choses ; mais il peut assigner les causes générales et celles dont l'action est constante ; chacun peut ensuite, selon les cas qui se présentent, apprécier les modifications qui sont résultées ou qui doivent résulter des circonstances accidentelles.
Il est impossible de suivre les variations des profits dans tous les cas particuliers ; ils peuvent subir des variations extrêmes en raison d'une découverte importante, d'une invasion, d'un siège. L'influence de ces circonstances particulières se combine avec l'influence des causes générales, mais ne la détruit pas. Un traité, quelque volumineux qu'on le suppose, ne saurait prévoir tous les cas particuliers qui peuvent influer sur la valeur des choses ; mais il peut assigner les causes générales et celles dont l'action est constante ; chacun peut ensuite, selon les cas qui se présentent, apprécier les modifications qui sont résultées ou qui doivent résulter des circonstances accidentelles.


Cela pourra paraître extraordinaire au premier abord, mais on trouvera généralement vrai à l'examen, que les meilleurs profits ne se font pas sur les denrées les plus chères et sur celles dont on peut le mieux se passer, mais bien plutôt sur les plus communes et les plus indispensables. En effet, la demande de celles-ci se soutient nécessairement : elle est commandée par le besoin ; elle s'étend même à mesure que les moyens de production s'étendent ; car c'est surtout la production des denrées de première nécessité qui favorise la population. La demande, au contraire, des superfluités, ne s'élève pas à mesure que s'étendent les moyens de production de ces mêmes superfluités ; si une vogue extraordinaire en fait monter le prix courant fort au-dessus du prix naturel, c'est-à-dire du montant des frais de production, une vogue contraire le fait tomber fort au-dessous ; les superfluités ne sont, pour les riches eux-mêmes, que d'un besoin secondaire, et la demande qu'on en fait est bornée par le petit nombre de gens à l'usage de qui elles sont. Enfin, lorsqu'une cause accidentelle quelconque force les gens à réduire leurs dépenses, lorsque des déprédations, des impôts, des disettes, viennent diminuer les revenus de chacun, quelles sont les dépenses qu'on supprime les premières ? On retranche d'abord les consommations dont on peut le mieux se passer. Cela suffit pour expliquer pourquoi les services productifs qui se consacrent à la production des superfluités, sont en général plus faiblement payés que les autres.
Cela pourra paraître extraordinaire au premier abord, mais on trouvera généralement vrai à l'examen, que les meilleurs profits ne se font pas sur les denrées les plus chères et sur celles dont on peut le mieux se passer, mais bien plutôt sur les plus communes et les plus indispensables. En effet, la demande de celles-ci se soutient nécessairement : elle est commandée par le besoin ; elle s'étend même à mesure que les moyens de production s'étendent ; car c'est surtout la production des denrées de première nécessité qui favorise la population. La demande, au contraire, des superfluités, ne s'élève pas à mesure que s'étendent les moyens de production de ces mêmes superfluités ; si une vogue extraordinaire en fait monter le prix courant fort au-dessus du prix naturel, c'est-à-dire du montant des frais de production, une vogue contraire le fait tomber fort au-dessous ; les superfluités ne sont, pour les riches eux-mêmes, que d'un besoin secondaire, et la demande qu'on en fait est bornée par le petit nombre de gens à l'usage de qui elles sont. Enfin, lorsqu'une cause accidentelle quelconque force les gens à réduire leurs dépenses, lorsque des déprédations, des impôts, des disettes, viennent diminuer les revenus de chacun, quelles sont les dépenses qu'on supprime les premières ? On retranche d'abord les consommations dont on peut le mieux se passer. Cela suffit pour expliquer pourquoi les services productifs qui se consacrent à la production des superfluités, sont en général plus faiblement payés que les autres.
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Les exemples que j'ai choisis dans l'industrie manufacturière ont des équivalents dans les industries agricoles et commerciales. Il se produit et se consomme en Europe pour une valeur bien plus grande de choux, qu'il ne se consomme d'ananas ; et les superbes châles de Cachemire sont en France un objet de commerce bien borné auprès des cotons en laine qu'on fait venir tous les ans d'outre-mer.  
Les exemples que j'ai choisis dans l'industrie manufacturière ont des équivalents dans les industries agricoles et commerciales. Il se produit et se consomme en Europe pour une valeur bien plus grande de choux, qu'il ne se consomme d'ananas ; et les superbes châles de Cachemire sont en France un objet de commerce bien borné auprès des cotons en laine qu'on fait venir tous les ans d'outre-mer.  


C'est donc un mauvais calcul pour une nation de se faire marchande d'objets de luxe, et de recevoir en retour des choses d'une utilité commune. La France envoie en Allemagne des modes, des colifichets qui sont à l'usage de peu de personnes, et l'Allemagne lui fournit des rubans de fil et d'autres merceries, des limes, des faulx, des pelles et pincettes, et d'autres quincailleries d'un usage général, et pour lesquelles il y a jusque dans nos villages des consommateurs forcés et un marché toujours ouvert. Aussi, sans les vins, sans les huiles de France, sans les produits toujours renaissants d'un sol favorisé de la nature, et quelques autres objets d'une industrie mieux entendue, la France ferait avec l'Allemagne moins de profits que l'Allemagne n'en fait avec elle. On en peut dire autant du commerce français dans le nord.
C'est donc un mauvais calcul pour une nation de se faire marchande d'objets de luxe, et de recevoir en retour des choses d'une utilité commune. La France envoie en Allemagne des modes, des colifichets qui sont à l'usage de peu de personnes, et l'Allemagne lui fournit des rubans de fil et d'autres merceries, des limes, des faux, des pelles et pincettes, et d'autres quincailleries d'un usage général, et pour lesquelles il y a jusque dans nos villages des consommateurs forcés et un marché toujours ouvert. Aussi, sans les vins, sans les huiles de France, sans les produits toujours renaissants d'un sol favorisé de la nature, et quelques autres objets d'une industrie mieux entendue, la France ferait avec l'Allemagne moins de profits que l'Allemagne n'en fait avec elle. On en peut dire autant du commerce français dans le nord.
 
 
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