Différences entre les versions de « Benjamin Constant:Commentaire sur l'ouvrage de Filangieri - Deuxième partie »

 
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«  Les nobles gagnaient à la législation nouvelle ; car elle ajoutait à la valeur vénale, et au produit annuel de leurs propriétés. Aussitôt que la terre devient libre, et que l'agriculture est dégagée de toutes les entraves, la conséquence nécessaire de ce double affranchissement est l'augmentation de la population et de l'aisance. L'effet de cette augmentation est la hausse de la valeur des terres et par conséquent une plus grande richesse pour ceux qui possèdent les propriétés les plus considérables.
«  Les nobles gagnaient à la législation nouvelle ; car elle ajoutait à la valeur vénale, et au produit annuel de leurs propriétés. Aussitôt que la terre devient libre, et que l'agriculture est dégagée de toutes les entraves, la conséquence nécessaire de ce double affranchissement est l'augmentation de la population et de l'aisance. L'effet de cette augmentation est la hausse de la valeur des terres et par conséquent une plus grande richesse pour ceux qui possèdent les propriétés les plus considérables.


«  Les bourgeois et les paysans y gagnaient plus encore que la noblesse. Par la nouvelle législation, ces deux classes seront, dans le cours d'un siècle, les propriétaires du sol dans la Prusse comme elles le sont sur les bords du Rhin.
«  Les bourgeois et les paysans y gagnaient plus encore que la noblesse. Par la nouvelle législation, ces deux classes seront, dans le cours d'un siècle, les propriétaires du sol dans la Prusse comme elles le sont sur les bords du Rhin. Partout où il y a des acheteurs il y a des vendeurs ; mais les meilleurs acheteurs sont incontestablement ceux qui peuvent donner le plus pour un objet, ceux par conséquent pour qui cet objet a le plus de valeur et rapporte davantage. Or, c'est pour le paysan que l'agriculture est surtout productive, pour le paysan qui visite son champ le premier le matin, et qui le quitte le dernier le soir. La sueur du cultivateur est le meilleur engrais des terres. Il est dans la nature de l'homme d'aimer la propriété , et aussitôt que l'on le permet à la classe agricole d'acquérir elle en trouve les moyens de reste. Cette classe se marie de bonne heure, parce qu'elle n'a pas d'inquiétude sur sa subsistance ; elle sait que son travail est sa richesse et que ses bras sont ses capitaux. Le berceau ne tarde pas à se placer près du lit conjugal, et la population augmente dans un tel pays presque aussi vite que sur le sol encore vierge de l'Amérique septentrionale. Ses cultivateurs achète arpents par arpents ; d'abord fermiers, et ensuite propriétaires, ils supplantent bientôt cette race d'agriculteurs, héritière et imitatrice de la féodalité et de la noblesse ; et qui a un précepteur pour ses enfants, une femme de chambre pour sa femme, un cocher pour ses chevaux, un chasseur pour ses chiens, un maître-valet pour ses ouvriers, et une femme de chambre pour ses servantes. Chez le vrai paysan, le maître et la maîtresse de la maison remplissent toutes ces fonctions en une seule et même personne.
 
«  Il est indifférent à l'Etat de savoir entre quelles mains la terre se trouve, pourvu qu'elle soit confiée à des mains actives et laborieuses ; que ces mains laborieuses aient pour ancêtres des privilèges est une chose de peu d'importance. La propriété et la liberté, voilà ce qu'il faut. Partout où ces deux choses existent, l'homme est actif et l'agriculture florissante, comme le prouvent les marais de la Hollande. Là où ces choses n'existent pas, l'agriculture tombe, et avec elle la population, comme le démontre l'Espagne, où les quatre cinquièmes du territoire étant entre les mains du clergé et de la noblesse, une population de vingt millions a été réduite à dix. La Prusse, qui a dans ce moment onze millions d'habitants, doit en avoir seize dans l'an 1850, par le seul effet de la nouvelle législation sur l'agriculture et de la division des propriétés. »
 
Tandis qu'un auteur prussien démontrait ces vérités au fond de l'Allemagne, tous les bons esprits les reconnaissaient en France.




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