Différences entre les versions de « Walter Lippmann:La Cité libre - Chapitre 11 - l'agenda du libéralisme »

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Ils étaient sans doute tout aussi sensibles et tout aussi soucieux de justice que les autres hommes. Mais au fond de l'impasse dogmatique dans laquelle ils étaient parvenus, leurs doctrines leur interdisaient de se fier à leurs sympathies ou de croire à la possibilité d'améliorer la condition humaine. Une fois figé dans ses propres erreurs, le libéralisme attira naturellement un nombre excessif d'arrivistes et d'opportunistes médiocres, et rebuta les hommes généreux, braves et clairvoyants.  
Ils étaient sans doute tout aussi sensibles et tout aussi soucieux de justice que les autres hommes. Mais au fond de l'impasse dogmatique dans laquelle ils étaient parvenus, leurs doctrines leur interdisaient de se fier à leurs sympathies ou de croire à la possibilité d'améliorer la condition humaine. Une fois figé dans ses propres erreurs, le libéralisme attira naturellement un nombre excessif d'arrivistes et d'opportunistes médiocres, et rebuta les hommes généreux, braves et clairvoyants.  


C'est à la débâcle de la science libérale que remonte le schisme moral qui divise si tragiquement les hommes éclairés dans le monde moderne. Les libéraux sont en effet les héritiers de la science qui interprète correctement le principe progressiste de la révolution industrielle.
C'est à la débâcle de la science libérale que remonte le schisme moral qui divise si tragiquement les hommes éclairés dans le monde moderne. Les libéraux sont en effet les héritiers de la science qui interprète correctement le principe progressiste de la révolution industrielle. Mais ils n'ont pas pu faire avancer leur science ; ils n'ont pas su en extraire une philosophie sociale satisfaisante du point de vue humain. Les collectivistes, d'autre part, ont le goût du progrès, la sympathie pour les pauvres, le sens éclatant de l'injustice, l'élan des grandes actions, qui ont manqué au libéralisme moderne. Mais leur science est fondée sur une profonde incompréhension de l'économie fondamentale de la société moderne, et c'est pourquoi leurs actes sont profondément destructeurs et réactionnaires. Aussi les cœurs sont-ils déchirés, les esprits divisés, et l'homme ne peut-il choisir. On lui demande de choisir entre, d'une part les libéraux qui sont arrêtés net, mais qui sont arrêtés sur la bonne route de l'abondance, de la liberté et de la justice, et d'autre part les collectivistes qui bougent furieusement, mais sur la route qui descend à l'abîme de la tyrannie, de la misère, et de la guerre générale.
 
Mais ce choix impossible ne s'impose que dans les esprits des hommes, dans leurs doctrines et dans leurs préjugés, et nullement dans la nature des choses. L'impasse est toute subjective. Elle est la conséquence de l'erreur humaine, et non du destin.


== Notes et références ==  
== Notes et références ==  
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