Différences entre les versions de « Franz Oppenheimer:L'Etat, son origines, son évolution et son avenir - Partie III : L'Etat maritime »

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Un certain nombre de ces États et villes maritimes ne se sont pas développés seulement par la conquête mais aussi à la suite de relations paisibles au moyen d'une pénétration plus ou moins pacifique.
Un certain nombre de ces États et villes maritimes ne se sont pas développés seulement par la conquête mais aussi à la suite de relations paisibles au moyen d'une pénétration plus ou moins pacifique.
Là où les Vikings se heurtèrent non à des paysans inoffensifs mais à des Etats Féodaux primitifs de caractère belliqueux, ils offrirent et acceptèrent la paix et s'établirent en simples colonies de marchands.
Là où les Vikings se heurtèrent non à des paysans inoffensifs mais à des Etats Féodaux primitifs de caractère belliqueux, ils offrirent et acceptèrent la paix et s'établirent en simples colonies de marchands.
De tels cas nous sont connus de l'histoire du monde entier dans les ports de mer comme dans les marchés territoriaux. Les formations qui nous sont le plus familières sont les établissements des marchands du nord de l'Allemagne, dans les territoires de la Mer du Nord et de la Baltique : le Steel Yard à Londres, la Hansa en Suède et en Norvège, à Schonen et Novgorod en Russie. Une colonie analogue existait à Vilna, la capitale des Grands Ducs de Lituanie et la Fondaco dei Tedeschi à Venise rentre également dans cette catégorie. Presque partout les étrangers sont installés à part formant des groupes distincts, ont leur droit et leur juridiction propres et acquièrent très souvent une influence politique considérable allant parfois jusqu'à la domination entière. On croit lire une description de l'invasion phénicienne ou hellène des terres méditerranéennes plusieurs siècles avant notre ère en parcourant les lignes suivantes de Ratzel parlant du littoral et des côtes de l'Océan Indien : « Des populations entières, en particulier les inévitables Malais originaires de Sumatra, proverbialement adroits et zélés, ont été dispersés par le commerce. Les Bougi des Iles Célèbes, aussi habiles que perfides, sont répandus partout depuis Singapour jusqu'à la Nouvelle-Guinée et ont récemment émigré en masse à Bornéo sur l'invitation des princes indigènes. Leur influence est si considérable qu'il leur est permis de se gouverner eux-mêmes d'après leurs propres lois, et ils se sentent si puissants qu'ils ont souvent tenté de se rendre tout à fait indépendants. Les Atchinois occupaient autrefois une position analogue. Après la déchéance de Malacca que les Malais de Sumatra avaient élevée au rang de centre commercial de premier ordre, Atjeh fut vers le commencement du XVIIe siècle la rade la plus fréquentée de l'Extrême-Orient4. » Quelques exemples pris entre mille nous montrent la propagation générale de cette forme de colonisation. « A Ourga où ils ont le pouvoir politique, les marchands vivent à part dans une ville chinoise5. » Dans les Etats israélites se trouvaient « de petites colonies de marchands et artisans étrangers auxquels on réservait certains quartiers des villes ; là, placés sous la protection du roi, ils pouvaient vivre en paix et suivre leurs coutumes religieuses ». Voir ''Rois'', l, 20, 346. « Omri roi d'Israël de la tribu d'Éphraïm, à la suite des succès de son adversaire le roi de Damas, se vit contraint d'abandonner aux marchands araméens certains quartiers de la ville de Samarie où ils purent trafiquer sous la protection royale. Lorsque plus tard la fortune de la guerre favorisa son successeur Achab, celui-ci exigea du roi Araméen les mêmes privilèges pour les marchands éphraïmites à Damas7. » « Les Italiques s'installaient partout en groupes distincts et fortement organisés, les soldats en légions, les marchands de chaque grande ville en sociétés parti culières, les citoyens romains domiciliés ou séjournant dans les divers districts provinciaux en « cercles » (conventus civium Romanorum) ayant leur liste de jurés, et même jusqu'à un certain point leur constitution municipale propre8. » Nous mentionnerons encore pour mémoire les ghettos des Juifs qui, avant les grandes persécutions du moyen âge, étaient simplement des colonies marchandes particulières. Nous noterons aussi à ce propos que de nos jours encore les négociants européens résidant dans les ports de puissants empires exotiques forment des « conventus » analogues, possédant leur propre administration et leur juridiction consulaire. Aujourd'hui encore, la Chine doit tolérer chez elle cet état de choses, de même que la Turquie, le Maroc, etc., et le Japon n'a secoué que depuis peu cette « ''diminutio capitis'' ».
 
Ce qui, dans toutes ces colonies, présente le plus d’intérêt pour notre étude est le fait qu'elles tendent partout à étendre leur influence politique jusqu'à la pleine domination. Cela ne présente en soi rien de surprenant. Les marchands possèdent une richesse en biens mobiliers qui les met à même de tenir un rôle décisif dans les troubles politiques auxquels les Etats Féodaux sont sans cesse en proie, soit dans les guerres entre deux Etats voisins, soit dans les guerres civiles, dans les querelles de succession. Ajoutons à cela que derrière les colons il y a généralement les forces de la Mère-Patrie sur laquelle ils comptent se sentant étroitement liés à elles par les attaches de famille et de puissants intérêts commerciaux. Ils ont en outre dans leurs équipages disciplinés et leurs nombreux esclaves une force indépendante dont l’importance n'est parfois pas à dédaigner. La description suivante du rôle joué par les marchands arabes dans l'Afrique orientale me parait ésenter un type historique dont on a trop peu tenu compte jusqu'à présent:
De tels cas nous sont connus de l'histoire du monde entier dans les ports de mer comme dans les marchés territoriaux. Les formations qui nous sont le plus familières sont les établissements des marchands du nord de l'Allemagne, dans les territoires de la Mer du Nord et de la Baltique : le Steel Yard à Londres, la Hansa en Suède et en Norvège, à Schonen et Novgorod en Russie. Une colonie analogue existait à Vilna, la capitale des Grands Ducs de Lituanie et la Fondaco dei Tedeschi à Venise rentre également dans cette catégorie. Presque partout les étrangers sont installés à part formant des groupes distincts, ont leur droit et leur juridiction propres et acquièrent très souvent une influence politique considérable allant parfois jusqu'à la domination entière. On croit lire une description de l'invasion phénicienne ou hellène des terres méditerranéennes plusieurs siècles avant notre ère en parcourant les lignes suivantes de Ratzel parlant du littoral et des côtes de l'Océan Indien : « Des populations entières, en particulier les inévitables Malais originaires de Sumatra, proverbialement adroits et zélés, ont été dispersés par le commerce. Les Bougi{{ref|32}} des Iles Célèbes, aussi habiles que perfides, sont répandus partout depuis Singapour jusqu'à la Nouvelle-Guinée et ont récemment émigré en masse à Bornéo sur l'invitation des princes indigènes. Leur influence est si considérable qu'il leur est permis de se gouverner eux-mêmes d'après leurs propres lois, et ils se sentent si puissants qu'ils ont souvent tenté de se rendre tout à fait indépendants. Les Acehnais{{ref|33}} occupaient autrefois une position analogue. Après la déchéance de Malacca{{ref|34}} que les Malais de Sumatra avaient élevée au rang de centre commercial de premier ordre, Aceh fut vers le commencement du XVIIe siècle la rade la plus fréquentée de l'Extrême-Orient{{ref|35}}. » Quelques exemples pris entre mille nous montrent la propagation générale de cette forme de colonisation. « A Oulan-Bator où ils ont le pouvoir politique, les marchands vivent à part dans une ville chinoise{{ref|36}}. » Dans les Etats israélites se trouvaient « de petites colonies de marchands et artisans étrangers auxquels on réservait certains quartiers des villes ; là, placés sous la protection du roi, ils pouvaient vivre en paix et suivre leurs coutumes religieuses ». Voir ''Rois'', l, 20, 34{{ref|37}}. « Omri{{ref|38}} roi d'Israël de la tribu d'Éphraïm, à la suite des succès de son adversaire le roi de Damas, se vit contraint d'abandonner aux marchands araméens certains quartiers de la ville de Samarie où ils purent trafiquer sous la protection royale. Lorsque plus tard la fortune de la guerre favorisa son successeur Achab{{ref|39}}, celui-ci exigea du roi Araméen les mêmes privilèges pour les marchands éphraïmites à Damas{{ref|40}}. » « Les Italiques s'installaient partout en groupes distincts et fortement organisés, les soldats en légions, les marchands de chaque grande ville en sociétés particulières, les citoyens romains domiciliés ou séjournant dans les divers districts provinciaux en « cercles » (''conventus civium Romanorum'') ayant leur liste de jurés, et même jusqu'à un certain point leur constitution municipale propre{{ref|41}}. » Nous mentionnerons encore pour mémoire les ghettos des Juifs qui, avant les grandes persécutions du moyen âge, étaient simplement des colonies marchandes particulières. Nous noterons aussi à ce propos que de nos jours encore les négociants européens résidant dans les ports de puissants empires exotiques forment des « ''conventus'' » analogues, possédant leur propre administration et leur juridiction consulaire. Aujourd'hui encore, la Chine doit tolérer chez elle cet état de choses, de même que la Turquie, le Maroc, etc., et le Japon n'a secoué que depuis peu cette « ''diminutio capitis'' ».
« Lorsqu'en 1857, Speke parcourut ce pays pour la première fois, les Arabes y résidaient à titre de marchands étrangers ; lorsqu'il revint en 1861 ils étaient devenus en apparence de grands seigneurs, possédaient de riches territoires et étaient en guerre avec le souverain héréditaire du pays. Ce processus, qui s'est répété sur maint autre point de l'Afrique Centrale, est le résultat inévitable des conditions existantes. Les marchands étrangers, Arabes et Souahélis, demandent et paient d'un tribut l'autorisation de passage, fondent des dépôts de marchandises fort goûtés des chefs dont ils semblent favoriser l'instinct d'extorsion et la vanité. Ces marchands s'enrichissent, nouent des relations nombreuses, deviennent suspects, sont opprimés et persécutés ; et se refusent enfin à payer l'impôt qui a augmenté avec leur fortune. Finalement dans l'une des inévitables querelles de succession, les Arabes prennent parti pour un prétendant promettant d'être docile, sont entraînés ainsi dans les divisions intérieures du pays et impliqués dans des guerres souvent interminables9. »
 
Cette action politique des métèques marchands se répète à l'infini. « A Bornéo des empires indépendants ont surgi des établissements de chercheurs d'or chinois10. » L'histoire entière de la colonisation européenne n'est qu'une suite ininterrompue de ces faits confirmant la loi qui – là où les puissances étrangères sont supérieures en force – transforme en domination effective les établissements commerciaux importants. Il n'en est autrement que lorsque ces établissements se rapprochent plutôt des entreprises de piraterie pure et simple comme par exemple la ''conquista'' hispano-portugaise et les conquêtes des Compagnies des Indes, tant anglaise que hollandaise. « Un Etat de brigands repose au bord de la mer, entre l'Escaut et le Rhin », dit Multatuli de sa patrie. Toutes les colonies des peuples européens, qu'elles soient situées en Extrême-Orient, en Amérique ou en Afrique, se sont formées d'après un de ces deux types.
Ce qui, dans toutes ces colonies, présente le plus d’intérêt pour notre étude est le fait qu'elles tendent partout à étendre leur influence politique jusqu'à la pleine domination. Cela ne présente en soi rien de surprenant. Les marchands possèdent une richesse en biens mobiliers qui les met à même de tenir un rôle décisif dans les troubles politiques auxquels les Etats Féodaux sont sans cesse en proie, soit dans les guerres entre deux Etats voisins, soit dans les guerres civiles, dans les querelles de succession. Ajoutons à cela que derrière les colons il y a généralement les forces de la Mère-Patrie sur laquelle ils comptent se sentant étroitement liés à elles par les attaches de famille et de puissants intérêts commerciaux. Ils ont en outre dans leurs équipages disciplinés et leurs nombreux esclaves une force indépendante dont l’importance n'est parfois pas à dédaigner. La description suivante du rôle joué par les marchands arabes dans l'Afrique orientale me parait présenter un type historique dont on a trop peu tenu compte jusqu'à présent :
La domination complète n'est pas toujours atteinte. Parfois l'Etat hospitalier est trop fort et les colons demeurent alors en qualité d'hôtes protégés, sans aucune influence , comme les Allemands en Angleterre. Parfois un conquérant plus puissant fond sur la colonie marchande et l'Etat hospitalier et les subjugue tous deux : les Russes détruisirent ainsi les républiques de Novgorod et de Pskof. Le plus souvent pourtant, les riches étrangers fusionnent avec les nobles indigènes pour former une classe dominatrice selon le type que nous ayons observé dans la fondation d'Etats Territoriaux, à la suite du heurt de deux groupes dominateurs de force à peu près égale. Ce dernier cas me semble fournir l'hypothèse la plus vraisemblable pour la genèse des plus importants Etats Urbains de l'Antiquité, pour les ports grecs et pour Rome.
 
« Lorsqu'en 1857, Speke parcourut ce pays pour la première fois, les Arabes y résidaient à titre de marchands étrangers ; lorsqu'il revint en 1861 ils étaient devenus en apparence de grands seigneurs, possédaient de riches territoires et étaient en guerre avec le souverain héréditaire du pays. Ce processus, qui s'est répété sur maint autre point de l'Afrique Centrale, est le résultat inévitable des conditions existantes. Les marchands étrangers, Arabes et Swahilis, demandent et paient d'un tribut l'autorisation de passage, fondent des dépôts de marchandises fort goûtés des chefs dont ils semblent favoriser l'instinct d'extorsion et la vanité. Ces marchands s'enrichissent, nouent des relations nombreuses, deviennent suspects, sont opprimés et persécutés ; et se refusent enfin à payer l'impôt qui a augmenté avec leur fortune. Finalement dans l'une des inévitables querelles de succession, les Arabes prennent parti pour un prétendant promettant d'être docile, sont entraînés ainsi dans les divisions intérieures du pays et impliqués dans des guerres souvent interminables{{ref|42}}. »
 
Cette action politique des métèques marchands se répète à l'infini. « A Bornéo des empires indépendants ont surgi des établissements de chercheurs d'or chinois{{ref|43}}. » L'histoire entière de la colonisation européenne n'est qu'une suite ininterrompue de ces faits confirmant la loi qui – là où les puissances étrangères sont supérieures en force – transforme en domination effective les établissements commerciaux importants. Il n'en est autrement que lorsque ces établissements se rapprochent plutôt des entreprises de piraterie pure et simple comme par exemple la ''conquista'' hispano-portugaise et les conquêtes des Compagnies des Indes, tant anglaise que hollandaise. « Un Etat de brigands repose au bord de la mer, entre l'Escaut et le Rhin », dit Multatuli{{ref|44}} de sa patrie. Toutes les colonies des peuples européens, qu'elles soient situées en Extrême-Orient, en Amérique ou en Afrique, se sont formées d'après un de ces deux types.
 
La domination complète n'est pas toujours atteinte. Parfois l'Etat hospitalier est trop fort et les colons demeurent alors en qualité d'hôtes protégés, sans aucune influence , comme les Allemands en Angleterre. Parfois un conquérant plus puissant fond sur la colonie marchande et l'Etat hospitalier et les subjugue tous deux : les Russes détruisirent ainsi les républiques de Novgorod{{ref|45}} et de Pskov{{ref|46}}. Le plus souvent pourtant, les riches étrangers fusionnent avec les nobles indigènes pour former une classe dominatrice selon le type que nous ayons observé dans la fondation d'Etats Territoriaux, à la suite du heurt de deux groupes dominateurs de force à peu près égale. Ce dernier cas me semble fournir l'hypothèse la plus vraisemblable pour la genèse des plus importants Etats Urbains de l'Antiquité, pour les ports grecs et pour Rome.
 
Nous ne connaissons l'histoire grecque qu'à partir de son moyen âge – employer l'expression de Curt Breysig – et l'histoire romaine à partir de son « époque moderne » seulement. Pour tout ce qui s'est passé aux temps antérieurs ce n'est qu'avec la plus grande circonspection que nous pouvons nous risquer à tirer des conclusions par analogie. Il existe néanmoins assez de faits probants pour nous justifier dans notre conclusion que Athènes, Corinthe, Mycènes, Rome, etc., ont dû devenir Etats de la manière décrite plus haut, et les faits relatés dans toutes les histoires et confirmés par l'ethnologie sont assez universellement acceptés pour justifier cette déduction.
Nous ne connaissons l'histoire grecque qu'à partir de son moyen âge – employer l'expression de Curt Breysig – et l'histoire romaine à partir de son « époque moderne » seulement. Pour tout ce qui s'est passé aux temps antérieurs ce n'est qu'avec la plus grande circonspection que nous pouvons nous risquer à tirer des conclusions par analogie. Il existe néanmoins assez de faits probants pour nous justifier dans notre conclusion que Athènes, Corinthe, Mycènes, Rome, etc., ont dû devenir Etats de la manière décrite plus haut, et les faits relatés dans toutes les histoires et confirmés par l'ethnologie sont assez universellement acceptés pour justifier cette déduction.
Nous savons par les noms de pays (Salamis – île de la paix, île de marché), les noms de héros, les monuments et aussi par la tradition qu'il existait dans un grand nombre de ports grecs des factoreriesaq phéniciennes dont l'''Hinterland'' était occupé par de petits Etats Féodaux possédant l'organisation hiérarchique caractéristique en nobles, hommes libres et esclaves. Qu'il soit vrai ou non que quelques phéniciens, peut-être quelques-uns de ces assez énigmatiques marchands cariens, aient été reçus dans le « ''connubium'' » des nobles du pays et soient devenus des citoyens ayant tous droits civils et politiques, et parfois même des souverains – la formation de ces Etats n'en a pas moins été favorisée puissamment par ces influences étrangères.
 
Nous savons par les noms de pays (Salamis – île de la paix, île de marché), les noms de héros, les monuments et aussi par la tradition qu'il existait dans un grand nombre de ports grecs des factoreries{{ref|47}} phéniciennes dont l'''Hinterland'' était occupé par de petits Etats Féodaux possédant l'organisation hiérarchique caractéristique en nobles, hommes libres et esclaves. Qu'il soit vrai ou non que quelques phéniciens, peut-être quelques-uns de ces assez énigmatiques marchands cariens, aient été reçus dans le « ''connubium'' » des nobles du pays et soient devenus des citoyens ayant tous droits civils et politiques, et parfois même des souverains – la formation de ces Etats n'en a pas moins été favorisée puissamment par ces influences étrangères.
 
Il en est de même à Rome. Voyons ce que dit à ce sujet un auteur aussi circonspect que Mommsen :
Il en est de même à Rome. Voyons ce que dit à ce sujet un auteur aussi circonspect que Mommsen :
« Rome doit, sinon sa fondation, du moins son importance à ces conditions commerciales et stratégiques comme le démontrent de nombreux indices autrement importants que les suppositions de fables soi-disant historiques. De là proviennent les antiques rapports avec Cures, qui était pour les Etruriens ce que fut Rome pour les Latins et qui devint la plus proche alliée commerciale de cette dernière cité. De là l'importance prodigieuse donnée aux ponts du Tibre et à la construction de ponts en général ; de là la galère dans les armes de la ville ; de là l’antique droit de port romain, véritable impôt sur le commerce, auquel n'étaient soumises à l'origine que les marchandises entrant dans le port d'Ostie pour être vendues (''promercale'') pendant que tout ce qui était destiné à l’usage du consignataire (''usuarium'') restait indemne. De là enfin, si nous anticipons un peu, l'introduction relativement hâtive à Rome de l'or monnayé et des conventions de commerce avec les Etats d'Outre-mer. Dans ce sens sans contredit Rome peut être considérée, comme le prétend la fable, comme une ville « créée », plutôt que « fondée » et serait ainsi la plus jeune et non la plus ancienne des villes latines11. »
 
Ce serait la matière des recherches historiques les plus intéressantes que de vérifier les lités ou mieux les probabilités suggérées ici et d'en tirer les conclusions si nécessaires touchant l'histoire constitutionnelle de ces importants Etats Urbains. Il me semble qu'il serait possible d'arriver de cette manière à l'élucidation de maint point de l'histoire demeuré obscur : par exemple la domination étrusque à Rome, l'existence des métèques athéniens, l'origine des riches familles plébéiennes et tant d'autres encore.
« Rome doit, sinon sa fondation, du moins son importance à ces conditions commerciales et stratégiques comme le démontrent de nombreux indices autrement importants que les suppositions de fables soi-disant historiques. De là proviennent les antiques rapports avec Cures, qui était pour les Etruriens ce que fut Rome pour les Latins et qui devint la plus proche alliée commerciale de cette dernière cité. De là l'importance prodigieuse donnée aux ponts du Tibre et à la construction de ponts en général ; de là la galère dans les armes de la ville ; de là l’antique droit de port romain, véritable impôt sur le commerce, auquel n'étaient soumises à l'origine que les marchandises entrant dans le port d'Ostie pour être vendues (''promercale'') pendant que tout ce qui était destiné à l’usage du consignataire (''usuarium'') restait indemne. De là enfin, si nous anticipons un peu, l'introduction relativement hâtive à Rome de l'or monnayé et des conventions de commerce avec les Etats d'Outre-mer. Dans ce sens sans contredit Rome peut être considérée, comme le prétend la fable, comme une ville « créée », plutôt que « fondée » et serait ainsi la plus jeune et non la plus ancienne des villes latines{{ref|48}}. »
 
Ce serait la matière des recherches historiques les plus intéressantes que de vérifier les possibilités ou mieux les probabilités suggérées ici et d'en tirer les conclusions si nécessaires touchant l'histoire constitutionnelle de ces importants Etats Urbains. Il me semble qu'il serait possible d'arriver de cette manière à l'élucidation de maint point de l'histoire demeuré obscur : par exemple la domination étrusque à Rome, l'existence des métèques athéniens, l'origine des riches familles plébéiennes et tant d'autres encore.
 
Nous ne pouvons ici que suivre le fil conducteur qui promet de nous guider, à travers le dédale de la tradition historique, vers l'issue désirée.
Nous ne pouvons ici que suivre le fil conducteur qui promet de nous guider, à travers le dédale de la tradition historique, vers l'issue désirée.


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# {{note|30}}Mommsen, 1, ch. I, p. 132.
# {{note|30}}Mommsen, 1, ch. I, p. 132.
# {{note|31}}Id., l, ch. I, p. 134
# {{note|31}}Id., l, ch. I, p. 134
# {{note|32}}
# {{note|32}}Ethnie la plus importante de la péninsule septentrionale des Célèbes (Indonésie) 
# {{note|33}}
# {{note|33}}Aceh (prononcer A-tché) est une province d'Indonésie, située sur la pointe nord de l'île de Sumatra. Ses habitants sont les Acehnais. La capitale de la province est Banda Aceh (autrefois Kutaraja, « la forteresse des rois »).
# {{note|34}}
# {{note|34}}Malacca (jawi : ملاك بندراي برسجاره, Melaka Bandaraya Bersejarah) est la capitale de l'état malais de Malacca. C'est le plus ancien port de Malaisie, fondé vers 1400 et qui a longtemps joué un important rôle stratégique, du fait de sa position dans le détroit de Malacca.
# {{note|35}}Ratzel, 1, ch. 1, p. 160.
# {{note|36}}Id. 1, ch. II, p. 558.
# {{note|37}}Buhl, 1, ch., p. 48.
# {{note|38}}Omri, en hébreu עָמְרִי, est un roi d'Israël, père d'Achab et fondateur de la dynastie des Omrides. Omri signifie "ma gerbe". Selon la Bible1, Omri était d'abord général du roi Éla mais, ayant appris, pendant le siège de Gebbéthon, que Zimri venait d'assassiner ce prince et de s'emparer du royaume d'Israël, il se fit proclamer roi lui-même marcha contre l'usurpateur et l'obligea à se brûler dans son palais. Il eut encore un autre compétiteur, Tibni, qui lui disputa quatre ans la couronne, mais celui-ci ayant aussi été tué, Omri resta seul possesseur de la souveraineté. Il régna douze ans, qu'on situe entre -881 et -8742. Omri réside 6 ans à Tirtza, puis il bâtit Samarie et en fait la capitale de son royaume.
# {{note|39}}Achab, fils d'Omri, fut roi d'Israël entre 874 et 853 av. J.C.. À la différence de nombreux rois d'Israël et de Juda, sa vie est très développée dans la Bible (plus de 6 chapitres du ''Premier livre des Rois''), sans doute à cause de ses démêlés avec le prophète Élie, qui a une grande importance dans la religion juive. La Bible le présente comme un roi impie. Selon l'usage de l'époque, son alliance avec la Phénicie lui fit épouser Jézabel, une princesse phénicienne, et elle l'amena à honorer son dieu, Baal, auquel il éleva un temple. Cette alliance et le culte qui en résultait l'opposèrent aux prophètes qu'il persécuta, notamment Élie. La Bible relate, entre autres, le sacrifice du Mont Carmel, où Élie affronta et massacra 450 prophètes de Baal, proches de Jézabel et envoyés par Achab ; et l'épisode de la vigne de Naboth, qu'Achab convoitait. Par de fausses accusations, Jézabel fit périr Naboth pour s'emparer de sa vigne, ce qui donna au prophète Élie l'occasion de condamner les époux royaux et d'annoncer leurs morts. Roi impie, Achab en appela cependant au dieu d'Israël quand il fut assiégé dans Samarie par Ben-Hadad II, roi d'Aram-Damas, et en fut délivré. Il tailla alors plusieurs fois en pièces les armées de ce prince, et le fit prisonnier, mais il finit par le rétablir dans ses États, contre la volonté des prophètes qui récusaient toute politique d'alliance et de conciliation afin de mettre le royaume entièrement entre les mains de Dieu. Peu de temps après, la guerre s'étant rallumée entre les deux rois, Achab périt dans un combat, percé d'une flèche. Les chiens se désaltérèrent de son sang, comme Élie l'avait prédit.
# {{note|40}}Id. 1, ch., p. 78-79.
# {{note|41}}Mommsen, 1, ch. II, p. 406.
# {{note|42}}Ratzel, 1, ch. II, p. 191. Cf. aussi p. 207-208.
# {{note|43}}Id. 1, ch. I, p. 363.
# {{note|44}}Eduard Douwes Dekker, dit Multatuli (du latin multa tuli : « J'ai beaucoup souffert »), est un poète et romancier néerlandais, né à Amsterdam le 2 mars 1820 et mort à Ingelheim am Rhein le 19 février 1887. Il est surtout connu pour son roman pamphlétique ''Max Havelaar''.
# {{note|45}}Novgorod (en russe : Великий Новгород, Veliki Novgorod, « Novgorod la Grande »), est une ville historique du nord-ouest de la Russie et la capitale administrative de l'oblast de Novgorod. Plus ancienne cité russe, elle est mentionnée dans les chroniques à partir de l'an 859. Sa dénomination en varègue Holmgard (également Holmgarðr, Hólmgarður, Holmgaard, Holmegård) est ainsi attestée dans des sagas nordiques à une époque très reculée. Il est pourtant difficile de départager la réalité de ce qui a trait à la légende. Vraisemblablement, Holmgard fait référence uniquement à la partie sud-est de la forteresse actuelle, dont l'appellation contemporaine est Riourikovo Gorodichtche ; c'est là que Rurik, considéré comme le premier monarque de Russie, fonda sa principauté. Au milieu du xe siècle, Novgorod est devenue une cité médiévale prospère située sur la route commerciale entre la mer Baltique et l'Empire byzantin. En 882, l'héritier de Rurik, Oleg le Sage, transfère sa capitale à Kiev, capitale de la Rus kiévienne. Novgorod est alors la deuxième cité de l'État par son importance. Selon une coutume, le fils le plus âgé et héritier du monarque régnant à Kiev est envoyé à Novgorod pour gouverner et ce même s'il est mineur. S'il n'y a aucun descendant mâle, Novgorod est alors gouvernée par les Posadniks. Certains deviendront célèbres comme Gostomysl, Dobrynya, Konstantin, et Ostromir. Quatre rois Vikings — Olaf Ier de Norvège, Olaf II de Norvège, Magnus Ier de Norvège et Harald Haardraade — trouvèrent un refuge contre leurs ennemis à Novgorod. De tous les princes, les Novgorodiens chérissent surtout la mémoire de Iaroslav le Sage. Ce dernier a promulgué les premières règles juridiques (incorporées plus tard dans le droit russe) et favorisé la construction de la cathédrale Sainte-Sophie. En signe de reconnaissance pour l'aide qui lui a été apportée par Novgorod pour défaire son frère aîné et obtenir le trône de Kiev, Iaroslav a attribué de nombreux privilèges à la ville. D'un autre côté, les Novgorodiens ont appelé leur place centrale Iaroslav. Elle regagne son autonomie après le sac de celle-ci au xiie siècle. Elle devient en effet en 1136 une république autonome gouvernée par l'assemblée des citadins, le vetché (en), qui élisait son kniaz (prince) ainsi qu'aux autres fonctions, y compris ecclésiastiques. Au xiiie siècle, la ville est membre de la Ligue hanséatique. À cette époque, Novgorod est menacée par l'avancée des Chevaliers Teutoniques. En 1242, le prince Alexandre Nevski gagne contre eux la bataille du lac Peïpous. Le commerce au cours du siècle suivant contribue à la forte prospérité de la cité hanséatique. En 1478, elle est annexée au gouvernement de la Moscovie par Ivan III, prince de Moscou. Elle sombre ensuite dans un déclin croissant du fait non seulement de sa dépendance à l'égard de la principauté de Vladimir-Souzdal pour son approvisionnement en grains, mais aussi des massacres de milliers de citoyens perpétrés par les troupes d'Ivan le Terrible en 1570.
# {{note|46}}Pskov (en russe : Псков) est une ville de Russie et la capitale administrative de l'oblast de Pskov. La ville, d’abord appelée Pleskov, est mentionnée pour la première fois en 903 lorsqu'Igor de Kiev épouse Olga de Kiev, originaire de la ville. Les Pskoviens prennent parfois cette date pour la date de fondation de la ville, et un grand jubilé a eu lieu en 2003 pour fêter son 1 100e anniversaire. Le premier prince de Pskov fut le dernier fils de Vladimir Ier de Kiev, Soudislav. Emprisonné par son frère Iaroslav le Sage, il ne fut libéré que plusieurs dizaines d’années plus tard, à la mort de ce dernier. Aux XIIe et XIIIe siècles, la ville appartenait à la république de Novgorod. Elle fut prise en 1241 par les chevaliers Teutoniques, puis reprise plusieurs mois plus tard par Alexandre Nevski au terme d’une campagne légendaire. Ce moment de l'Histoire fut le sujet, en 1938, du film de Sergueï Eisenstein, Alexandre Nevski, dont la célèbre musique fut composée par Sergueï Prokofiev, qui l'adapta l'année suivante sous la forme d'une cantate pour mezzo-soprano, chœur et orchestre. Afin d’assurer leur indépendance vis-à-vis des chevaliers Teutoniques, les Pskoviens choisirent pour prince et chef militaire en 1266, un prince lituanien, Daumantas. Celui-ci fortifia la ville, défit les chevaliers à la bataille de Rakovor et imposa sa domination sur la majeure partie de l’Estonie. Son corps et son épée reposent au kremlin de Pskov, et le cœur de la citadelle qu’il y fit construire porte encore le nom de « ville de Dovmont ». Au XIVe siècle, la ville devint ''de facto'' la capitale d’une république souveraine. Elle était dominée par les marchands qui firent entrer la ville dans la ligue hanséatique. L’indépendance de Pskov fut formellement reconnue par Novgorod en 1348. Plusieurs années plus tard, le vetche (assemblée populaire) promulgua la Charte de Pskov, qui fut l’une des sources d’inspiration principales du premier code civil spécifiquement russe, le soudiebnik compilé et présenté en 1497. Pour la Russie, la République de Pskov était un pont vers l’Europe. Pour l’Europe, c’était un avant-poste russe cible de nombreuses attaques à travers son histoire. Son kremlin (appelé le Krom par les Pskoviens) soutint vingt-six sièges au cours du xve siècle. Jusqu’à cinq murailles l’encerclaient, rendant la ville pratiquement imprenable. Plusieurs éléments se conjuguèrent pour mettre fin à l'indépendance de la République de Pskov. Parmi ceux-ci, le renforcement des liens commerciaux, politiques et militaires avec la Moscovie, qui finit par l’envahir. Certains boyards et marchands de Pskov essayèrent de s'opposer à l'annexion par la Moscovie, mais sans obtenir le soutien des citoyens. La chute de Pskov est narrée dans ''L'Histoire moscovite de la prise de Pskov'' (1510). La déportation des familles nobles vers Moscou est le thème de l’opéra ''La Jeune Fille de Pskov'' de Rimski-Korsakov (1872). En tant que seconde plus grande ville de Moscovie, Pskov attirait encore les armées ennemies. Elle soutint notamment le siège prolongé d'une armée polonaise de 50 000 hommes lors de la guerre de Livonie (1581–1582). Le roi de Pologne Étienne Báthory lança 31 attaques successives pour prendre la cité, défendue principalement par des civils. Même après la chute de l’un des murs de la ville, les Pskoviens parvinrent à combler la brèche et à repousser les assaillants. « C’est incroyable comme cette ville me rappelle Paris », écrivit un Français présent au siège de Báthory.
# {{note|47}}Le lieu, le bureau où les facteurs ou agents font les affaires d’une compagnie de commerce en pays étranger, surtout aux colonies.
# {{note|48}}Mommsen, l, ch., p. 46.
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