Différences entre les versions de « Walter Lippmann:La Cité libre - Chapitre 9 - la grande révolution et la montée de la "grande association" »

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Mais un peu d'expérience enseigna bientôt à Lénine que la question n'était pas si simple. L'expérience ne put cependant lui enseigner les principes d'un ordre socialiste. Car, comme nous l'avons vu, ces principes n'existent pas, et sont, de par la nature des choses, introuvables<ref>Voir ch. V et VI.</ref>. Ce qui dispensa Lénine de se poser la véritable question, et permit à la dictature communiste de faire l'expérience d'une économie planifiée administrée par l'autorité gouvernementale ce fut, d'abord la guerre civile et l'intervention étrangère qui nécessitèrent la mobilisation générale, ensuite la famine et la pénurie extrême de toutes les marchandises indispensables à la vie, sans qu'on eût à se poser de questions trop compliquées sur la nature de ce que l'on devait produire ; enfin, ce fut la grande mobilisation du plan quinquennal, destinée à faire de la Russie une puissance militaire autarcique capable de lutter sur deux fronts.
Mais un peu d'expérience enseigna bientôt à Lénine que la question n'était pas si simple. L'expérience ne put cependant lui enseigner les principes d'un ordre socialiste. Car, comme nous l'avons vu, ces principes n'existent pas, et sont, de par la nature des choses, introuvables<ref>Voir ch. V et VI.</ref>. Ce qui dispensa Lénine de se poser la véritable question, et permit à la dictature communiste de faire l'expérience d'une économie planifiée administrée par l'autorité gouvernementale ce fut, d'abord la guerre civile et l'intervention étrangère qui nécessitèrent la mobilisation générale, ensuite la famine et la pénurie extrême de toutes les marchandises indispensables à la vie, sans qu'on eût à se poser de questions trop compliquées sur la nature de ce que l'on devait produire ; enfin, ce fut la grande mobilisation du plan quinquennal, destinée à faire de la Russie une puissance militaire autarcique capable de lutter sur deux fronts.
Tout cela n'avait absolument rien de commun avec la doctrine marxiste, et c'est pourquoi l'« expérience » russe n'est pas une démonstration d'économie socialiste. Certes, elle est une économie planifiée, administrée par l'autorité, et elle a aboli le marché en tant que régulateur de la production. Mais si les Russes ont pu régler la production sans marchés, c'est uniquement parce que la famine et la nécessité militaire se sont chargées de la régler. Et l'on peut prévoir à coup sûr que si jamais la Russie cesse d'éprouver le besoin d'une mobilisation, il deviendra nécessaire de liquider l'autorité planifiante et de revenir d'une façon ou d'une autre à une économie marchande<ref>C'est vrai de tous les régimes totalitaires. Ils sont indirigeables si ce n'est dans une situation assimilable à celle de la guerre, et c'est pourquoi l'antagonisme réciproque des dictateurs fascistes et communistes est nécessaire pour les perpétrer les uns et les autres. Comptons sur leur instinct de conservation pour les inciter à continuer à se menacer les uns les autres.</ref>.
D'autre part, les doctrines d'Adam Smith furent loin de perdre aussi subitement leur valeur lorsque ses partisans arrivèrent au pouvoir. Voilà plus d'un siècle que ses principes ont servi de guide pratique à des nations florissantes. Je ne veux pas dire qu'Adam Smith a révélé une fois pour toutes toute la vérité, et que ses écrits sont comme le Coran ou la Bible, ou encore comme la doctrine marxiste aux yeux des marxistes naïfs. Certes, il y a eu beaucoup de gens de cet avis, et la stricte observance des doctrines d'Adam Smith a causé énormément de confusion parmi les capitalistes, les juristes et les sociologues au cours de tout le XIXe siècle. Mais en pénétrant le sens de la division du travail, Adam Smith a fait une généralisation scientifique des plus exactes et des plus décisives, qui restera valable tant que ne naîtra pas un mode de production radicalement nouveau. C'est pourquoi, bien que les enseignements d'Adam Smith aient eu besoin d'être affinés et complétés, bien que ses considérants soient souvent périmés, ses idées centrales restent vivantes. Tout ce qu'on y ajoute ou qu'on en retranche reste compatible avec son idée fondamentale. La pensée progressiste authentique du monde moderne découle de sa découverte que la richesse des nations est due à la division du travail sur des marchés toujours plus larges et partant toujours plus libres.


== Notes et références ==  
== Notes et références ==  
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